UNE VIE TUMULTUEUSE ET ANECDOTIQUE

MA VIE PROFESSIONNELLE ET SENTIMENTALE, DES MON RETOUR DE PRISON

Etant sans emploi, je me suis inscrit à ANPE. La société Altec-Sopitec, dont le siège était à Paris, avait déposé le bilan. Pourtant l’usine de Montbrison fonctionnait bien, nous avions un commercial particulièrement efficace qui avait un portefeuille client conséquent. L’ancien directeur, ayant trouvé un financier, repris l’unité de production de Montbrison, la S.M.E (Société Montbrisonnaise d’Extrusion). Il reprit un certain nombre de ses anciens collaborateurs, dont je fis partie, mais pas l’ancien directeur commercial. Le courant ne passait très bien entre eux. Le directeur pensait récupérer sa clientèle, mais entre-temps, l’ancien commercial avait monté une agence sur Thiers. La S.M.E fit donc faillite. Je gagnais à l’époque 2 800 Francs par mois.
Je me retrouvais de nouveau au chômage. Arrivé en fin de droit, j’étais prêt à accepter n’importe quel emploi. Il y avait une société, où un de mes frères travaillait comme monteur de film dans l’une de leur filiale, la S.M.I.C (Société Montbrisonnaise d’Impression et de Cartonnage) que je sollicitais pratiquement tous les mois. Mais, comme dans nombre d’entreprises, à l’accueil il y avait quelqu’un qui faisait barrage. Finalement, j’ai pu avoir une entrevue avec le directeur. J’avais cru comprendre que dans la filiale où mon frère travaillait, il y aurait un emploi. Et bien que ma formation ne fût pas en adéquation avec le poste à pouvoir, je pourrais rapidement m’adapter. En fait, il n’avait rien à me proposer. Etant sur le point de partir, je lui signale toutefois qu’avec moi s’il avait un problème sur ces machines, je pourrais les dépanner. Son regard s’illumina soudainement. « Alors là, vous m’intéressez bougrement » me dit-il. Il me fit visiter son atelier. Il était constitué de presses de dernière génération. Il ouvrit les armoires électriques équipées de cartes électroniques, pensant m’impressionner. J’étais impressionné, mais il ne fallait surtout pas que je le montre. « Pensez-vous être à la hauteur ? » Quelle question, je n’avais pas le choix. « Bien sûr ». Il m’expliqua qu’il allait rentrer une rotative et qu’il envisageait d’embaucher quelqu’un pour la maintenance de ce matériel, vu le taux horaire, qu’il ne pouvait pas se permettre qu’elle soit arrêtée longtemps.
Je lui avais expliqué dans quelle situation financière je me trouvais. Et je crois qu’il en a profité. Je gagnais moins que ce je touchais au chômage. Qui plus est, j’ai été embauché par trois entreprises en même temps, la société Haubtmann à Saint Priest en Jarez, la G.I.E (Groupement Intérêt Economique) Achber à Sury le Comptal et l’imprimerie S.M.I.C. à Montbrison. Trois fiches de paye. J’avais mon bureau à Montbrison, mais c’était l’imprimerie Haubtmann qui me gérait en tant que salarié. Au bout du compte, j’intervenais dans toutes les imprimeries de la région jusqu’à Lyon.
Mais quand la rotative est arrivée, mise en route, il n’était plus question que je travaille pour les autres. Créant de toute pièce le service maintenance de l’entreprise. Je me suis fait faire un atelier avec le nécessaire pour intervenir dans de bonnes conditions : multimètre, oscilloscope, générateur de tension etc... Rapidement, il m’est devenu nécessaire de m’adjoindre un collègue. Construisant un nouvel atelier, avec des machines-outils, telles qu’un tour, une fraiseuse, une perceuse sur colonne … nous pouvions traiter pratiquement tous les problèmes que nous pouvions rencontrer, que ce soit d’ordre mécanique, pneumatique, hydraulique, électrique ou électronique. J’ai même conçu et dessiné les plans d’une machine pour le façonnage que nous avons fabriquée entièrement dans notre atelier. Mon patron était passé voir où on en était, j’ai dû m’absenter un instant, je ne sais plus pour quelle raison. Mon collaborateur était seul avec mon patron et regardant avec étonnement une carte électronique qui pilotait l’engin, il interrogea en chuchotant mon collègue : « C’est Bernard qui a fait ça ? ». Quand on est doué, on est doué, je n’y peux rien. Je crois qu’il faut que je desserre mes chaussures, mes chevilles enflent très légèrement. Mes revenus augmentaient progressivement en 1980 je gagnais 4 900 Francs par mois, en 1981 5 700 Francs, en 1982 6 800 Francs.

  Ce que nous a permis de nous donner un peu de bon temps.

Un de mes beaux-frères était passionné par la navigation à voile. Il avait fait plusieurs stages de formation intensive sur plusieurs semaines et était devenu un expert en la matière. Il nous proposa de louer un voilier et de faire une petite croisière en mer. A plusieurs couples nous pouvions répartir les coûts et louer un grand voilier. Cela restait abordable. Ainsi il loua un First Beneteau flambant neuf de 12 mètres au pavillon Belge. Il avait quatre cabines dont trois chambres équipé de lit pour deux personnes et la cabine centrale de deux banquettes convertibles en couchette une place. Ce bateau avait tous les équipements nécessaires pour la vie en totale indépendance. Il y avait une cuisine, un salon, des sanitaires et une douche. Les cabines allaient être pour mes sœurs et mon frère ainé et ma femme et moi-même nous allions prendre les couchettes. Nous voilà partis pour une semaine en mer Méditerranée. Il y avait une radio et j’avais la responsabilité des informations météorologiques chaque matin vers 8 heures. Cela nous était nécessaire avant de décider de nos sorties en mer et en fonction des vents nous déterminions une route, une voie à suivre. Nous sortions pratiquement tous les jours et nous changions ainsi de port d’attache à chaque fois. En règle générale nous déjeunions à bord et dinions dans un restaurant sur le port. Le mari de ma sœur « B » avait vécu une partie de sa jeunesse sur la côte d’azur et aimait la pêche. Il est arrivé qu’il prenne à la ligne des anguilles et sur les criques, où il nous jetions l’ancre, il ramassait des oursins qu’il mangeait sur le champ. Il nous arrivait régulièrement de plonger du pont pour le plaisir en faisant toutes sortes d’acrobaties jusqu’au jour où mon beau-frère piqua du nez à la vertical, la tête la première et d’une manière assez brutale. Je me rendis compte que quelque chose d’anormal se passait. C’est pourtant un très bon nageur mais je voyais qu’il avait de la difficulté à remonter à la surface. Il partait dans tous les sens. Il s’était pété les tympans perdant ainsi le sens de l’orientation. Affolé, il réclama notre aide pour sortir de l’eau. Il ne savait plus où était le bas du haut, la droite de la gauche. Nous étions trois mecs pour le sortir, je peux vous dire que même à trois pour le hisser à bord cela n’a pas été une partie de plaisir. Il était amorphe, asthénique et ne pouvait nous aider d’aucune manière, complètement paumé, déséquilibré. Il lui a fallu quelques heures pour qu’il reprenne ses esprits et retrouve très lentement ses moyens.
Un jour, nous décidons de faire une grande viré. Nous sommes partis au lever du jour avant même que je puisse recueillir les infos sur la météo. Nous étions rassurés car la mer était calme, une mer d’huile. Très peu de vent, nous sortions au moteur. Mais une fois au large, les choses se sont gâtées. Le vent commença à s’intensifier et la mer à s’agiter. Rapidement nous étions au sein d’une forte tempête. Nous nous sommes rapidement attachés, dès que cela avait commencé à bouger mon épouse est descendu en cabine vomir son petit déjeuner. Nous avions bien sûr affalé les voiles et naviguions désormais au moteur. C’était impressionnant en quelques minutes la mer était démontée, les vagues étaient plus hautes que le mat du bateau. Il tanguait d’avant en arrière se balançait dans tous les sens de droite à gauche, les aiguilles qui indiquaient l’assiette du bateau oscillaient d’une butée à l’autre. Sur le coup je n’avais pas conscience du danger j’étais comme en admiration face aux éléments, l’adrénaline montait, c’était fantastique, hallucinant. Un pare-battage (une bouée pour protéger votre bateau du contact extérieur, à quai ou à couple avec un autre bateau) c’était décroché, nous n’avons pas cherché à la récupérer ! Ce n’est que qu’arrivés à bon port (sans jeu de mot) que mes jambes se mirent à trembler et mes genoux s’entrechoquer, je commençais seulement à réaliser ce qui s’était passé.

  Diakonoprint

En 1983, le 12 Juillet, avec deux de mes frères, nous créons la société Diakonoprint, au capital de 20 100 Francs, spécialisée en vernissage dans le domaine de l’imprimerie. Pour ce qui était du capital, avec mon frère aîné, nous avons payé la part de mon frère Alain 6 700 Francs, cela a été une erreur, car, bien que salarié à temps plein, il ne s’est jamais trop impliqué dans notre entreprise. A la différence de mon autre frère Christian, qui nous a rejoint pour vraiment nous aider alors qu’il n’était pas actionnaire. Je travaille à temps partiel à la S.M.I.C. et en parallèle je prends la gérance de notre société. Nous investissons dans une vernisseuse d’occasion puis dans une pelliculeuse. Notre progression était lente au début puis subitement, une fois connue, trop rapide. Notre trésorerie n’était pas à la hauteur. En moins d’un an, nous étions 9 salariés. Nous avons payé des agios colossaux, nous escomptions pratiquement toutes nos lettres de change (traites bancaires). Au même moment une entreprise similaire s’est installée sur la Ricamarie. Notre activité se réduisant, nous avons dû licencier. Nous avons travaillé sans relâche, le weekend, des journées de 72 heures. Finalement, fatigués, épuisés, nous avons abandonné.
Ma famille en a pâti d’autant qu’entre temps en Février 1984 ma femme a accouché d’une jolie petite fille, d’une gentillesse et d’une douceur exceptionnelle. Nous nous étions porté caution solidaire pour le financement des machines. Nous avons négocié un remboursement avec la banque. Bien qu’ayant un salaire mensuel de 10 700 Francs, j’ai dû déménager de la belle maison que je louais sur Moingt pour habiter dans une H.LM. (Habitation à Loyer Modéré) sur Montbrison. D’un commun accord avec mon épouse, j’ai continué à travailler à temps partiel. En 1986, mes revenus ont légèrement diminué à 9 300 Francs, n’ayant plus le complément de salaire de la société que nous avions créée.
Avec ma femme et mes deux enfants, nous formions une belle famille. Je repris avec plus d’énergie, mes activités spirituelles au sein de la congrégation. Quelques années passèrent. Cependant avec le temps, insidieusement, j’ai commencé à me lasser. La prédication, les études bibliques à domicile, la préparation des réunions … devenaient progressivement plus une contrainte que cet amour empreint d’abnégation que, sincèrement, je témoignais à l’égard de mon prochain. J’avais le sentiment de passer à côté de quelque chose. De ne pas profiter, un tant soit peu, de la vie.

  Mon couple se dérobe de manière inopinée

Je me suis inscrit dans une école de danse. Une fois par semaine, je suivais des cours de claquettes. Ma femme ne partageait pas mes centres d’intérêt. Je me rendais compte qu’en définitif, mis à part la religion, nous n’avions pas grand-chose en commun. Cela a duré deux ans.
Puis un jour, lors d’une sortie en prédication, ramenant à leur domicile les proclamateurs qui étaient avec moi, réglant mon rétroviseur, je m’aperçus qu’une jeune « sœur » (sœur spirituelle) me fixait du regard. Je ne voulais pas y prêter attention. Cependant, la chose se reproduisit de nouveau à une autre occasion. Elle avait à peine 18 ans et moi 32 ans. C’était une très belle jeune fille. Je l’ai abordée pour comprendre. Elle m’avoua qu’elle ressentait quelque chose à mon égard. Je lui avouais que je n’étais pas insensible mais, qu’étant marié, nous ne pouvions pas maintenir ce type de rapport. Elle consacrait beaucoup de temps à la prédication, il m’arrivait donc de l’accompagner dans cette activité. Nous discutions beaucoup, pour ne faire que ça quand nous étions ensemble. Je lui expliquais que c’était dangereux et que notre relation allait dégénérer. Bien que lors de nos entrevues je mettais la bible entre nous, nos sentiments ne faisaient que croitre. Cette relation a duré ainsi plus d’un an, jusqu’au jour où nous nous sommes embrassés. Puis quelques mois plus tard nous avons fait l’amour. J’ai trouvé dans cette relation quelque chose que je n’avais jamais ressenti auparavant. Elle aimait la danse, la musique. Pour le mariage de son frère, nous avions fait une chorégraphie. Avec ses sœurs, je leur avais appris quelques pas de claquette. J’avais besoin de la voir. La nuit, prétextant d’aller faire un tour pour trouver le sommeil ou aller à l’usine pour dépanner une machine, j’allais la rejoindre. Elle, de son côté, passait pas la fenêtre de sa chambre, une boite de pâté à la main qu’elle donnait au chien pour qu’il reste tranquille et qu’il n’aboie pas. J’ai passé des moments intenses avec elle. Jusqu’au jour où elle a dû partir aider une de ses sœurs et nous avons décidé que c’était l’opportunité pour mettre fin à notre aventure. Je ne l’ai revue qu’une ou deux années plus tard. Cela a été dur pour moi.
Durant ce laps de temps, je fréquentais une famille qui possédait un billard français. Je m’étais lié d’amitié avec le père qui n’était pas Témoin de Jéhovah. J’allais très régulièrement jouer chez eux. La famille était composée de trois garçons et une fille. Quand nous jouions, la fille venait nous voir. Nous entretenions une relation amicale. Jusqu’au jour où je me suis rendu compte qu’il se passait quelque chose entre elle et moi. Lors d’une sortie de prédication, alors que je l’accompagnais, je lui ai dit qu’il fallait que j’arrête d’aller chez ses parents parce que je sentais que cela allait mal finir. Elle répliqua aussi sec : « Ce n‘est pas de ma faute si je t’aime ». Je lui ai pris la main et je ne l’ai plus jamais lâchée. Nous avons commencé à nous voir dans la cadre des sorties de prédication puis de fil en aiguille … Elle était jolie, sportive, un peu garçon manqué. Elle suivait des cours de langues étrangères et s’intéressait à toutes sortes de choses.
Avant de divorcer le 10 Janvier 1991, nous avons fait le point, je voulais être sûr que je n’allais pas prendre cette lourde décision pour rien. Nous nous sommes mis ensemble. Elle a continué ses études à la faculté de Saint Etienne jusqu'à obtenir une maîtrise en langue étrangère. Pour subvenir aux besoins de mes enfants, j’ai repris mon travail à temps complet. Mes revenus étaient de 12 000 Francs par mois. Je versais la moitié de mes revenus à mon ex-femme, ce qui était bien supérieur à ce qui avait été demandé par le tribunal.
Quand j’avais la garde de mes enfants, je m’efforçais de leur faire découvrir toutes sortes d’activités. La musique, j’avais une guitare et un piano à leur disposition. La danse, j’avais inscrit mon fils aux cours de claquettes. Lors des grandes vacances, nous allions dans des centres aérés avec de nombreuses animations pour les enfants, équitation, quad, canoé kayak, piscine … Ma fille n’avait pas de chance, quand nous partions à cheval, il est arrivé que son cheval l’éjecte, et en quad, son pied est passé sous la roue arrière. Nous sommes partis plusieurs fois en Espagne près de Barcelone. Une fois, après avoir visité la ville, sa cathédrale et sa fontaine aux jets d’eau et de lumière au rythme de la chanson interprétée par Freddie Mercury et Montserrat Caball, je me suis perdu en voiture. Je me suis retrouvé dans une zone industrielle, il faisait nuit et le long de l’avenue il y avait une voiture de police qui faisait la causette avec des prostituées complètement nues.
Matériellement parlant, mes enfants ne peuvent pas me reprocher quoi que ce soit. Aujourd’hui encore je verse une pension compensatoire à mon ex-épouse. Etant exclu de l’organisation des Témoins de Jéhovah, les relations que j’entretenais avec mes enfants devenaient de plus en plus tendues. Ayant la garde des enfants, elle continua de les éduquer selon les préceptes de sa religion. Je les voyais un weekend sur deux et un mois durant les vacances scolaires. Mon ex-femme a quitté la région, pour s’installer vers Angoulême et m’éloigner de mes enfants à sa manière. Malgré la distance, près de 400 km, j’ai continué à prendre mes enfants. C’était bien sûr moi qui faisais le trajet. A 18 ans, mon fils fit part de son souhait de plus me voir, suivant ainsi les instructions prodiguées par les anciens de la congrégation des Témoins de Jéhovah d’Angoulême. Il était majeur, je ne pouvais pas m’y opposer. Quelques semaines plus tard, ma fille me fit la même requête à laquelle j’ai accédé. J’ai eu beaucoup d’amertume, à ce moment-là, à l’égard de mon ex-femme et des Témoins de Jéhovah.
Durant ce laps de temps, mon frère Alain a été condamné à 4 ans de prison pour un acte criminel. Un inceste avec sa fille issue de son premier mariage. Quand il nous a raconté la manière dont cela s’est passé, j’ai eu une aversion encore plus grande à son encontre. Sa fille était, soi-disant nue dans sa chambre sur son lit écoutant de la musique ‘pornographique’. Peut-être du style de Gainsbourg ‘je vais et je viens entre tes reins’. Toujours selon ses propos, il entra dans sa chambre pour la réprimander et déclara ‘tu veux savoir ce que c’est que baiser’ et il la prise debout. Décrivant son acte, il dit qu’il la pénétra comme dans du beurre, supposant qu’elle avait eu déjà des rapports sexuels. Par ma part j’ai dû mal à le croire, bander devant sa fille pour la réprimander je n’y crois pas. Pour bander il faut qu’il ait une excitation. Je pense qu’il y avait une connivence et que ce n’était pas la première fois. Cette fille était maltraitée par sa belle-mère, c’était sa cendrillon. Jamais de mot gentil, de câlin, de tendresse à son égard. A-t-elle voulu se venger en provoquant mon frère ? A-t-il voulu la consoler, la réconforter, compenser le manque d’affection de son épouse et tomber dans le piège d’un ‘amour’ incestueux ? Il a évidemment été exclu. Père de 5 enfants, il était sans ressource. La famille de sa femme leur est venue en aide. Mais de notre côté, je suis le seul qui l’ai aidé financièrement chaque mois et rendu visite à la prison. Un jour, il m’a écrit et j’ai senti qu’il avait intention de mettre fin à ses jours. Je me suis rendu en catastrophe lui rendre visite à 400 km de mon lieu de résidence. Quand il est sorti de prison et que je me suis rendu chez lui pour prendre de ses nouvelles, je suis resté sur le pas de porte. Il n’a jamais pris de mes nouvelles. Quand je l’ai revu à l’enterrement de mon père, je lui ai demandé qu’est-ce que je lui avais fait, il me répondit qu’il avait des doutes ! Doutes de quoi, moi qui suis isolé de toute part.

JE M’INVESTIS AU TRAVAIL

Les machines dans les ateliers commencent à être équipées d’ordinateurs et d’automates. Une aubaine pour moi, je maîtrisais déjà l’informatique à un très haut niveau à la maison pour le plaisir. Je me faisais un plaisir de personnalisé les programmes à l’effigie de l’entreprise.
Nous avions une machine à répéter installée dans une pièce à l’abri de la poussière. C’est une machine qui, comme son nom l’indique, sert à répliquer un même film sur une plaque d’impression. Par exemple, une étiquette pouvait ainsi être répétée plusieurs fois. Cela évitait de faire un montage sur un grand film avec autant de petits films qu’il y a d’étiquettes. Pour certains travaux, quand il y avait beaucoup de poses, le temps était long et l’opérateur devait patienter. J’avais modifié le programme de telle manière qu’à partir d’une combinaison de touche il pouvait passer du pilotage de la machine à un jeu que j’avais créé : le « Mastermind ». J’avais fait une disquette pour l’installateur au cas où il aurait souhaité personnaliser son programme à ses propres clients.
C’est à peu près à cette époque, que mon frère aîné intégra la société en qualité de deviseur.
Chaque fin d’année, le P.D.G. offrait un apéritif durant lequel il présentait ses vœux. Une année, pour cette occasion, la direction décida de faire une grande messe durant laquelle chaque service de l’entreprise se présenterait. Elle nomma un commercial pour animer la soirée. Celui-ci fit comme un audit d’entreprise prenant le temps de voir chaque responsable pour pouvoir poser les bonnes questions lors de la présentation de leur fonction. A l’époque, j’étais « considéré » comme quelqu’un de réservé. Je faisais mon travail avec passion mais en toute simplicité. « Ne vous souciez pas de n’être pas remarqué, chercher plutôt à faire quelque chose de remarquable » disait Confucius au 5è siècle avant notre ère. Je ne me rappelle plus de la conversation que nous avons eu. J’ai dû suffisamment le marquer par mes réalisations pour qu’il le signale à la direction. C’est ce qu’il me rapporta quelques années plus tard.
Subitement un rapprochement s’effectua entre la direction et moi. Je participais aux choix des investissements. Je constituais un dossier technique sur les différentes presses, avantages, inconvénients. Je réalisais des essais impressions soit en Allemagne à Heidelberg pour une presse Speed Master, soit en Angleterre à Leeds pour une Litrone de Komori.
Quand eut lieu la Grande Messe au cinéma le Rex, tous les employés et ouvriers étaient présents, les commerciaux des bureaux de Paris et Lyon, les ouvriers de l’unité de façonnage de Sury le Comtal et les employés de la filiale S.T.A.G (Société de Travaux d’Arts Graphiques), près de deux cents personnes. Je fis une brève allocution et répondis aux questions de notre commercial aux mains tremblantes. Un collègue demanda à mon frère assis à ses côtés, comment se faisait-il que je sois si à l’aise pour parler devant une assistance aussi importante, moi qui était plutôt réservé, discret dans l’entreprise. Il lui expliqua que jadis j’avais fait des discours devant des auditoires beaucoup plus conséquents.

  Une usine à la pointe de la technologie

Quelques temps plus tard, je me vis confier un projet bien plus important. L’entreprise envisageait de construire une usine à la pointe de la technologie. J’avais la responsabilité de superviser toute la partie technique du projet. Un concours d’architecte a été organisé. Une fois le choix établi, avec l’aide des architectes, nous réalisions le plan de l’usine. La partie bureau et accueil de la clientèle était géré par la direction, avec piscine et fontaine à l’entrée et patio à l’intérieur autour duquel se situaient les bureaux. Le budget pour cette partie était deux fois plus élevé que celle dont j’étais chargé. J’avais carte blanche, la direction avait totalement confiance en moi. Je voulais premièrement que l’usine soit la plus silencieuse possible, un vrai défi, car par définition une presse est singulièrement bruyante. Les sources sonores sont dues principalement à tous les appareils périphériques, compresseur d’air, pompe à vide, pompe soufflante, production d’eau glacée … L’objectif était de déporter et centraliser la gestion de ces flux dans un local technique spécifique. Faire un vide sanitaire pour acheminer par le sous-sol les fluides nécessaires à chaque unité de production. Socrate me dit : « Le premier savoir est le savoir de notre ignorance, c’est le début de l’intelligence ». Et mon ami Confucius de me confier encore : « Quand on désire savoir, on interroge. Quand on veut être capable, on étudie. Revoyez sans arrêt ce que vous savez déjà. Etudiez sans cesse du nouveau. Alors vous deviendrez un ‘Maître’ ». Pour m’assurer de la faisabilité de mes ambitions, je suis allé visiter quelques entreprises de renom. À Monaco, il y a avait une imprimerie qui se trouvait au troisième étage d’un bâtiment industriel. En Angleterre, une entreprise qui utilisait déjà une galerie pour amener certains fluides. Puis je suis allé aux Etats-Unis, à Philadelphie, au Kansas. J’ai organisé de nombreuses réunions techniques entourées d’ingénieurs de toutes sortes. C’est là que j’ai pu vérifier une fois de plus l’expression utilisé par le pape Grégoire IX « l’habit ne fait pas le moine ». Parmi ces élites, vous n’imaginez même pas le nombre d’absurdités qui ont pu être proférées, notamment au sujet de la ventilation de ma galerie en raison de la circulation de produit, certes dangereux, comme le gaz et l’alcool isopropylique. J’ai dû démontrer que si les canalisations étaient réalisées de manière appropriée et dans les règles de l’art, il n’y avait pas lieu d’aérer de la manière qu’ils le préconisaient. Je crois que certains, comme nos hommes politiques, prenaient un maximum de précautions, c’est un euphémisme, pour ne pas prendre le moindre risque au cas où il y aurait un problème par la suite. Le projet était bien ficelé, mais en raison de conjoncture économique, il a été gardé sous le coude. Nous avons seulement acheté le terrain.

  Directeur du système d'information

Mon patron me disait que dès qu’il me voyait commencer à regarder par la fenêtre, il fallait qu’il me trouve un nouvel os à ronger. Notre système d’information étant obsolète, sans gestion de la production, une nouvelle mission me fut confiée.
Avec l’aide d’un consultant extérieur, nous partons à la recherche d’un logiciel dédié à l’imprimerie. Jusqu'à présent la S.M.I.C. avait investi dans de la mini-informatique avec ces écrans alphanumériques aux textes de couleur orange. Les budgets consacrés à ce type machine sont colossaux. La micro-informatique commençait juste à se développer. J’orientais nos recherches vers ce type de technologie au mode graphique bien plus convivial. Après avoir fait le tour des éditeurs, nous n’avions pas grand-chose à proposer. Pour la première fois, je me suis senti en situation d’échec. Confucius écrivit : « Notre plus grande gloire n’est point de tomber, mais de savoir nous relever chaque fois que nous tombons ». Après quelques jours de réflexion, avant de présenter notre rapport à la direction, je confie à notre consultant que j’envisageais de proposer le développement des logiciels en interne. Avec une certaine ironie, il me dit que pour ce faire il faut que je monte un dossier avec un schéma directeur, un budget etc… Je sentais, avec son air présomptueux, qu’il pensait que c’était au-dessus de mes compétences. En fait, Il ne savait pas à qui il avait affaire, il ne me connaissait pas. Le 13 octobre 1993, la direction à l’unanimité signe mon projet. J’avais constitué un dossier en béton.
Pour faire simple (je ne suis pas sûr) et pour ceux que cela intéresse, voici quelques aspects contenu dans mon projet :
    Description de la configuration du système d’information, le système d’exploitation (Windows NT), la base de données (SQL Server), Interface utilisateur (Access ou VB), Hardware (Micro-ordinateur multiprocesseur).
    Description du chef de projet, sa place dans l’organisation (Rattaché au P.D.G.), ses missions (Economiques, Techniques, Qualité, Humaines), Dimension du poste (3 personnes, 4 domaines d’application, 40 postes de travail), Objectifs pour les 2 années à venir (Gestion des stocks, Devis, Production, Facturation…).
    Implication de la direction. Un courrier, que j’avais préparé, stipulant l’engagement personnel du P.D.G., définissant avec précision son implication et les moyens à mettre en œuvre.
    Le choix d’intégrateurs qualifiés qui pourraient prendre la suite en cas de problème.
    Maîtrise du projet par la mise en place d’un P.Q.P. (Plan Qualité Projet)
    Définition des ressources internes, matérielles, logicielles et humaines.
    Planification détaillée de réalisation comprenant le nom de chaque application, la date de l’étude, du développement, de la mise en route et de la validation.
    Plan de la mise à disposition des utilisateurs, leurs noms et les périodes concernées.
    Description de la méthodologie de l’étude détaillée, de l’étude technique (logique et technique)

Le budget total au niveau software était de 512 830 Francs, au niveau hardware de 620 150 Francs soit 1 132 980 Francs. Cela peut paraître important, mais par rapport à de la mini-informatique c’est peut-être trois à quatre fois moins cher.
Me voilà parti dans une aventure folle. J’ai embauché ma compagne de l’époque en qualité de secrétaire, elle s’occupait de toute la partie budget, la rédaction des manuels utilisateurs et la traduction de certains documents. J’ai recruté un développeur qui m’avait été conseillé par un collègue. Ce qui m’énervait parfois c’est qu’il passait des heures devant des problèmes qu’il n’arrivait pas à résoudre, sans m’en parler. Alors qu’en 2 minutes, je lui trouvais une solution. « Choisissez un travail que vous aimez et vous n’aurez pas à travailler un seul jour de votre vie » révéla Confucius. J’ai passé des heures et des heures à n’en plus finir sur mon ordinateur, mais je ne voyais pas le temps passer. Mon statut évoluant, je suis devenu cadre supérieur avec une voiture de fonction (une 205 coupé turbo diésel avec toit ouvrant) en qualité de D.S.I. (Directeur du Système d’Information).
Désormais je fais partie du comité de direction. En toute modestie, j’ai toujours eu une facilité à diagnostiquer les problèmes et à trouver des solutions. Si bien, que nombre de fois notre P.D.G., m’invitant à m’exprimer, m’introduisait avec humour disant : « Laissons la parole au ‘Sage’ ». Vous vous rappelez, c’est ce que je voulais être quand j’étais petit. Comme le sage Confucius, je peux dire : « Ecouter et choisir entre les avis voilà le premier pas de la connaissance. Voir et réfléchir sur ce qu’on a vu, voilà le second pas de la connaissance ». J’ai toujours dis ce que je pensais, même si parfois, cela a blessé mon P.D.G. et provoqué le licenciement du directeur commercial export. Aménémopé, un scribe égyptien, il y a plus de 3 000 ans, nous livra ce conseil : « Tu dois t’efforcer d’être sincère avec ton prochain même si cela doit lui causer du chagrin ». Je n’applique, toutefois, cette recommandation qu’avec les gens pour lesquels j’ai une profonde estime.

  Directeur d'usine

Courant de l’année 2001, notre directeur technique décide de se mettre à son compte et quitte soudainement l’entreprise. Nous avions 15 jours pour trouver une solution. Notre directeur commercial proposa que je prenne sa place. Je n’étais pas très enthousiaste à l’idée d’avoir plus d’une centaine de personnes sous mes ordres. Un nouveau chalenge s’offrait à moi. Sur le plan humain, le directeur technique, me fit la confidence, qu’au niveau des responsables de service, il me laissait un panier de crabes. Sur le plan technique, nous annoncions haut et fort que nous maîtrisions la technologie lenticulaire, alors qu’on en était absolument incapables. Sur le plan financier, nous avions un taux de réfection avoisinant les 10% du chiffre d’affaire.
Sur le plan humain, j’ai envoyé en formation de management les deux cadres qui ne pouvaient pas se blairer. Quand ils sont revenus, ils étaient cul et chemise. Pour le reste du personnel, ayant eu un parcours assez inhabituel au sein de l’entreprise, j’étais respecté. Je connaissais le matériel sur le bout des doigts et dans les bureaux, l’ensemble des logiciels, je les avais développés.
Sur le plan financier, avec l’aide du R.A.Q. (Responsable Assurance Qualité) de l’une de nos filiales, nous avons revu tout notre système de contrôle qualité. En moins d’un an, le taux de réfection est devenu inférieur à 3%.
Sur le plan technique, l’imprimerie avait une expérience reconnue au niveau international. La préoccupation de la société était d'être toujours "à la pointe" en matière de nouveaux produits et de matériel. Impressions complexes sur des supports synthétiques. Cependant, en interne les choses n’étaient pas aussi simples que cela. Certes, nous avions une expérience mais nous n’en avions pas forcément la compréhension. Il nous arrivait d’imprimer un jour et le lendemain d’en être incapable. Il y avait des paramètres dont on ignorait l’existence, on ne pouvait donc pas en avoir la maîtrise.

  Directeur en recherche et développement

Je crée deux groupes de travail. Un premier, constitué d’un biochimiste de la société Sun Chemical (fabricant d’encre) et d’un ingénieur en recherche et développement de la société de la société Priplack (fabricant de matière plastique). Le deuxième est identique au premier mais avec des fabricants différents. Notre objectif était de revoir de manière scientifique tous les procédés de fabrication, des encres, des supports d’impression, des conditions de stockage et de leur livraison jusqu'à l’impression dans nos ateliers. Nous avons réalisé des centaines d’essais et de tests de tous ordres et ainsi mis le doigt sur les points sensibles que l’on ne maîtrisait pas. Ce faisant, je créais une base de données reprenant l’ensemble de nos savoir-faire. De directeur d’usine, je suis devenu rapidement directeur en recherche et développement.
Parlons de la technologie lenticulaire. L'imagerie lenticulaire est un procédé permettant de produire des images qui donnent une impression de relief (3D) ou qui changent en fonction de l'angle d’observation. Jusqu'à présent les impressions que nous réalisions n’étaient pas acceptables. Rapidement je compris que le problème majeur était la déformation de matière dans la presse et des films aux prépresses. Les groupes d’impression doivent être en repérage à 10 microns près. Une lenticule fait 336 µ et dans une lenticule peut être entrelacée une vingtaine d’images. Au niveau des masters, c’est l’image qui doit être imprimée, nous avions deux fournisseurs. Impossible d’avoir des informations sur la conception des images, chasse gardée, secret bien protégé. Les masters étant fournis sous forme de fichier numérique, il m’a été facile d’en comprendre leur réalisation. Ce qui m’a servi plus tard. Je ne voulais pas réaliser les masters, ce n’est pas la vocation d’une imprimerie, me semble-t-il. J’avais un projet un peu délicat et aucun de nos fournisseurs ne voulut concevoir le master, en quelque sorte ils me plantaient. Nous avions des engagements auprès de notre client et le temps pressait. En une semaine, je développe un logiciel de mastering. A l’époque, il n’en existait pas. Les masters étaient réalisés à partir de Photoshop. Là, où les macros commandes de Photoshop mettaient plus d’une heure, mon logiciel ne mettait que quelques secondes. Et depuis ce jour, je réalisais personnellement les images.
L'Euro est devenu la monnaie unique le 1er janvier 2002. Nous avons fabriqué des millions de convertisseurs euro/franc. Nous avions un client farfelu, quand vous l’aviez au téléphone, vous aviez l’impression de parler avec quelqu’un de la haute société, très distingué dans ses propos. Une fois qu’il était en face de vous, vous aviez un clown, il lui manquait juste le nez rouge. C’était un savant fou, c’est lui qui invita : le bouchon de champagne qui s’extrayait seul d’une bouteille de champagne le 1 Janvier 2000 à 0 heure ; le cabinet de toilette pèse personne ; le patch anti agression à New York du temps de Monica Lewinsky. Il était paranoïaque, il renvoyait très régulièrement ses collaborateurs convaincu qu’ils donnaient des informations à la concurrence. Un client important difficile à gérer. Il pensait que je pouvais diriger l’entreprise comme un jouet. Faire venir des équipes du jour au lendemain pour travailler le dimanche, par exemple. Une fois il voulut venir un samedi pour mettre au point un dossier urgent. Sachant qu’il était très catholique, pour l’embêter, je lui dis que je ne pouvais me libérer que le dimanche (il ne faudra pas le répéter). Le dimanche, nous travaillons ensemble et le midi allons déjeuner au golf de Savigneux. Au cours du repas, il sort de sa poche une grosse liasse de billets me demandant de le privilégier au sein de l’entreprise, de le rendre prioritaire. Evidemment je n’ai pas accepté. Mon P.D.G. m’a dit que j’avais eu tort, cela m’aurait fait de l’argent de poche.

  Séquence3d

L’impression lenticulaire prenant de l’essor, je décide en 2002 de créer une société dédiée à la réalisation des masters avec l’accord de mon patron. La société Séquence3d. C’est une Société Anonyme au capital 50 000€. Bien qu’étant constitué seulement de 3 personnes, le fait que ce soit une S.A. (avec un PDG + un directoire de 8 associés + commissaire au compte, etc..) nos clients avaient l’impression d’avoir affaire à une grosse boutique. C’est ainsi que nous avons pu travailler avec de très grandes sociétés de la cosmétique, avec (pour ne pas le citer) l'un des principaux acteurs de l'industrie agroalimentaire de la planète, les producteurs de film 3d pour les jaquettes de DVD … 95% de nos commandes venaient d’Internet.
Je m’étais investi dans la création d’un site unique en son genre. Il développait tous les aspects de l’imagerie lenticulaire. En effet pour être en première page des moteurs de recherche, il faut, un référencement naturel, avoir du contenu, de la notoriété et activité journalière (nouveauté, mise à jour …).
Pour le contenu, j’abordais 7 thèmes : les bases de la technologie ; les termes utilisés en informatique, sur le lenticulaire et dans l’imprimerie ; l’optique ; la vision tridimensionnelle à savoir la fonction visuelle et la perception de la profondeur ; l’impression ; la chimie organique des thermoplastiques ; l’histoire du relief à travers les siècles.
Pour les nouveautés, chaque jour les nouvelles créations et techniques de fabrication étaient mises en ligne. Nos clients pouvaient formuler leurs demandes de prix, déposer les éléments techniques (photo, image, dessin …) et voir l’état d’avancement de leurs dossiers.
Pour ce qui est de la notoriété, il faut que les autres parlent de vous. J’ai inscrit le site, dans les centaines de moteurs recherches avec une description différente à chaque fois, ainsi que dans les différents réseaux sociaux. J’ai également créé des dizaines de sites faisant l’éloge et la recommandation de mon site principal.
Notre société est devenue la référence des impressions lenticulaires en Europe.
A cette époque l’imprimerie SMIC commençait à avoir des difficultés, le neveu du PDG lui succéda aux affaires. Il dirigea l’entreprise sous l’influence d’un mauvais conseiller. Pour ma part, je me suis retiré du comité de direction et j’ai fini par être licencié avec une rupture de contrat conventionnelle. J’avais établi un accord d’affaire entre nos deux sociétés, mais quand la SMIC a été vendu, les nouveaux dirigeants ont commencé à démarcher mes propres clients. Je mis donc fin à nos accords. Mon frère Jean-Marie travaillant comme commercial à l’imprimerie Comelli et ayant les équipements adéquats pour l’impression lenticulaire, nous avons établi un partenariat. Mais sous-traitant progressivement leur activité plastique, je finis par travailler avec la société Trapinex. Mon frère travaillait indirectement pour moi en tant qu’apporteur d’affaires et bien que rémunéré par son entreprise, je lui versais une commission en numéraire. Et du jour au lendemain, dès qu’il a pris sa retraite, je n’ai plus eu de nouvelle.

JE ME FAIS PLAISIR

Que les choses soit claires. Pour ma part, j’ai toujours associé le bonheur au contentement. Ani (vizir égyptien 1 550 ans av. J.-C.) déclara « N’emplis pas ton cœur des biens d’autrui » et Aménémopé (scribe égyptien 1 000 ans av. J.-C.) de rajouter « Ne t’épuise par à rechercher la richesse. Ce que tu possèdes, que cela te suffise ». Ainsi dans la mesure de nos moyens, nous nous sommes octroyé quelques voyages.
Pour commencer, nous sommes allés visiter la Guadeloupe, sa forêt luxuriante, ses plages et son port. Il y avait l’arrivée de la route du rhum. J’avais déjà vu des voiliers accostés au port en France, mais jamais de cette taille, c’est vraiment impressionnant.
C’est là-bas, que je me suis initié à la plongée. Je voulais connaître les règles de sécurité pour pratiquer ce sport en autonome. A l’hôtel où nous étions, on avait la possibilité de prendre des cours. Je me suis inscrit. La première des leçons, la prise en main du matériel. De base, le masque, pour voir, le tuba, pour respirer en surface et les palmes pour se déplacer. Maintenant si vous voulez plonger sans avoir à remonter en surface pour prendre l’air, il faut un scaphandre composé d’un détendeur, pour respirer, d’une bouteille haute pression contenant l’air et d’un manomètre immergeable pour contrôler la pression de l’air. En complément vous aurez besoin du gilet de remontée, pour se maintenir en surface et s’équilibrer en plongée, d’une combinaison, pour se protéger du froid, et d’une ceinture de lest, pour compenser la flottabilité de la combinaison. Tous ces éléments sont étudiés en détail avant d’en envisager leur utilisation. Puis vient la mise à l’eau en piscine. Le moniteur me demande de descendre au fond du bassin, de m’asseoir et de remonter dès qu’il me fera signe. Je descends, m’assois et attends patiemment. J’aperçois ses pieds dans l’eau au bord. Le temps passe et ma respiration inconsciemment s’accélère et je commence à perdre mon souffle. Je me dis « Tu ne vas pas remonter maintenant pour ta première mise en eau et de surcroit dans une piscine. Reprends tes esprits, calme-toi, aspire lentement une rasade d’air et tu expires également doucement » Progressivement je repris le contrôle. C’était un bon test psychologique, voir si l’on ne cède pas facilement à la panique. En mer, les exercices portent sur le lâché et la reprise d’embout, le vidage du masque, l’équilibrage des oreilles, l’utilisation du gilet de remontée entre deux eaux et à la remontée. Un exercice portait sur la manière de porter secours à un plongeur en détresse, partager le détendeur. Et un jour, je ne sais d’où il sortait, je vois un plongeur descendre à la vertical la tête la première sans détendeur à la bouche. En moi, je commence à rire, on est en train de me faire une blague. Il faut dire que, quelques jours avant, à la dérobée, il m’avait fermé la bouteille d’air comprimée. Je joue donc le jeu, je viens au secours de ce plongeur, je le prends par le colback et après avoir pris une bonne bouffée d’air, je lui donne mon détendeur en positionnant dans sa bouche. L’erreur … il ne voulait plus me le rendre. Tout cela était bien sûr un exercice, néanmoins je reconnais avoir balisé un moment. On ne donne jamais son détendeur, on le passe en le gardant toujours en main. Aujourd’hui, le problème ne se pose plus, un détendeur de secours est obligatoire. Maîtrisant la langue des signes en immersion, j’ai passé le niveau 1. Si vous plongez dans la réserve Cousteau, vous ressortez époustouflé par la variété de poissons que vous avez pu observer. Vous êtes incapable d’en décrire un seul, tellement qu’il y en a de sortes différentes et de couleurs différentes.
Nous sommes montés à la Soufrière (Volcan en activité) et nous avons pu entrevoir la lave à travers une fosse. Le sol grondait comme une grosse cocote minute. L’odeur du soufre est comparable à l’odeur des œufs pourris, c’est infect.
Pour nos 10 ans de vie commune, nous sommes partis à l’ile Maurice dans un magnifique hôtel, dans une petite maison sur la plage à une cinquantaine de mètres de l’océan.
Nous avons fait la visite de l’île à vélo et en taxi suivant les recommandations du Guide du routard. A l’hôtel, le service était gênant, il y avait un serveur pour chaque hôte qui vous suivait au buffet vous prenait l’assiette des mains et vous servait selon vos souhaits, il vous raccompagnait jusqu’à votre table, déposait l’assiette, tirait la chaise pour vous asseoir et la remettait en place pour que vous vous asseyez.
Le voyage qui m’a le plus marqué, c’est l’Egypte avec la descente du Nil en croisière. Nous avons commencé par la visite du musée au Caire avec Toutânkhamon, dont on connaît le célèbre masque mortuaire en or massif.
Puis, les pyramides dont la Pyramide de Mykérinos en granite. Etant collectionneur de pierre, je voulais récupérer un petit caillou de la pyramide dans les décombres. Avec une grosse pierre, j’essayais d’en casser une autre pour en prendre un petit bout. Je me baisse à l’abri des regards, commence ma besogne et au même moment j’entends siffler. Je me redresse, regarde attentivement autour moi, rien. Je recommence et de nouveau j’entends quelqu’un siffler. Je me relève, rien. Je me dépêche de casser mon caillou, malgré les sifflements.
Cela a été l’occasion de faire un tour à dos de dromadaire ainsi qu’une balade en calèche. La visite des temples reste un moment inoubliable. M’intéressant aux religions du monde, j’ai été servi avec le Temple d’Amon, de Khonsou à Louxor, d'Horus situé à Edfou et les deux temples d'Abou Simbel. J’ai ramené pour mes enfants des médaillons en or avec leurs prénoms en hiéroglyphe.
Un Raid en 4x4 au Maroc, sympa aussi. A travers les montagnes de l'Atlas et des villages berbères au départ de Marrakech jusqu'à Merzouga. A la découverte des terres arides, des reliefs abruptes, des palmeraies et des canyons. Des soirées autour d’un feu de bois avec les tamtams et dormir sous les tentes au milieu des chèvres. Le plus embarrassant était la traversée des villages sans ralentir avec la poussière que l’on soulevait et les femmes qui étendaient leur linge. Dans le petit Atlas, il y avait des zones où affleurait une quantité inattendue de fossiles, coquillages, ammonites, ce qui laisse supposer que ces montagnes étaient jadis recouvertes d’eau. Par moment nous nous arrêtions dans des endroits apparemment désertiques pour admirer le paysage et soudain dans les minutes qui suivaient il y avait des vendeurs qui surgissaient de nulle part, proposants toutes sortes trucs, objets de souvenir. Cette pratique était interdite, c’est pourquoi il y avait des guetteurs qui avertissaient dès qu’une voiture suspecte approchait et ils disparaissaient aussi rapidement qu’ils étaient apparus.
En plus du raid, nous nous étions organisés pour rester une semaine de plus à Marrakech. La ville était en plein développement pour accueillir les touristes. Cependant il y avait déjà de quoi faire. Pour commencer l’incontournable place Jemaa-el-Fna (l’assemblée des morts, on y tranchait jadis la tête des condamnés) avec au premier plan les charmeurs de cobras qui vous proposaient de les prendre dans vos bras pour la photo, puis il y avait les acrobates réalisant toutes sortes de figures jusqu’à la pyramide humaine à 4 étages vous proposant là encore de vous placer devant au centre pour la photo. Sur la place, chaque clic est payant. Au centre se trouve les étals de nourriture, de viande où foisonnaient des centaines de mouches. Cette place somme toute quelconque est entourée de maisons, d’échoppes, de restaurants et d’hôtels sans intérêt architectural. Elle débouche au nord-est en face du Café de France sur les souks qui s’étalent sur plusieurs centaines de mètres. A l’entrée, les poteries, cela a été l’occasion de s’offrir un plat à tajine, puis des fruits secs et des épices. Plus loin le domaine du cuir, un vendeur nous happe voulant nous faire réaliser une affaire, le président Chirac, photo à l’appui, était venu jadis acheter une pèlerine. Encore plus loin les ateliers de teinture, à l’entrée on vous donne une feuille de menthe à placer sous le nez pour masquer l’odeur des chaudrons où mijotent d’étonnantes mixtures. Le spectacle de ces étendages colorés et pittoresque est éblouissant, éclaboussant. Ce n’est pas évident de se repérer, la première fois nous nous sommes perdus.
L’une des promenades les plus agréables de Marrakech est sans aucun doute le jardin du peintre Jacques Majorelle avec ses bassins, fleurs, plantes et arbres constituant à chaque recoin un tableau de maître. L’atelier du peintre célèbre pour ses murs bleus abrite un petit musée d’art islamique.
Située au cœur une immense oliveraie, la Ménara, un bassin de 150 par 200 mètres, renvoyant comme un miroir le reflet d’un pavillon à la silhouette gracieuse, vaut le détour.
Après la visite de Marrakech, nous sommes allés jusqu’à Essaouira. Sur le trajet surpris par ce que nous observions, nous nous sommes arrêtés pour prendre en photo, moyennant quelques pièces, les chèvres carrément montées dans les arganiers. Parvenus sur les lieux une immense plage s’étire sur plusieurs kilomètres. La ville est bordée de remparts ocres ce qui contraste des maisons blanches de la ville. Une rampe d’accès mène à la sqala de la Kasbah, dont les remparts crénelés, avec ses canons de bronze, surplombe majestueusement l’océan. Après avoir déjeuné, une promenade s’imposait le long du port, les barques blanches et bleues sont alignées presque immobiles, la vie c’est arrêtée quelques instants. Les marins font la sieste sur les filets en guise de matelas.
Rentrant à l’hôtel, nous nous faisons accoster par un homme qui nous avait repérés à l’hôtel dit-il. Il est cuisinier et nous indique les meilleurs endroits pour nos achats. Insistant et prêt à nous accompagner, nous cédons. Il nous emmène dans une sorte de bazar immense et pendant que nous regardons les marchandises je le vois discrètement discuter avec le vendeur avec des gestes nous montrant négociant sans doute une commission sur nos achats. Nous avons prétexté ne plus avoir d’argent sur nous et que nous reviendrons plus tard. J’avais lu dans le guide du Routard déjà ce type de tactique. Il parlait d’automobiliste garé sur le côté simulant une panne et pour remercier, les personnes qui s’arrêtaient pour leur venir en aide, il leurs indiquait des adresses et que s’il venait de sa part ils auraient à coup sûr les meilleurs prix.
Des années plus tard, cette fois avec Marie nous sommes retournés à Marrakech. Un ancien directeur financier de la SMIC avait refait sa vie au Maroc. Il nous invita pour son mariage. Il avait rencontré dans un bistro une serveuse berbère qui allait devenir sa femme. Elle était beaucoup plus jeune que lui. Nous avons été plusieurs à l’avertir sur les jeunes femmes en quête de mari pour avoir la nationalité française. Mais pour se marier, il fallait qu’il se convertisse à la religion musulmane. Pour commencer il devait porter un prénom arabe. Mon petit Bruno s’appelait dorénavant Mustapha.
Il a pu négocier et éviter la circoncision et pour prouver la virginité de sa compagne, il dû acheter un certificat médical. Ceci dit nous avons été accueillis comme des princes, hormis les billets d’avion il prit tout à sa charge. Nous étions dans l’hôtel où descendait le président Sarkozy à côté de l’ambassade de France. Il nous avait réservé une suite.
Le jour du mariage, nous étions une cinquantaine de français qui partions de l’hôtel jusqu’au lieu des festivités. Il n’y en a pas un qui a payé le même prix de la course. C’est moi qui ait négocié le meilleur prix, mais après réflexion, au fond de moi, j’avais honte, je me rendais compte que je discutais sur des ristournes ridicules, d’une dizaine de dirhams soit moins d’un euro. A l’entrée de la salle des fêtes, de part et d’autre d’une allée des femmes chantaient au rythme de leurs tambourins et sur le seuil de la porte étaient postés deux soldats berbères montés à cheval. Arrivés à leur hauteur ils nous donnaient leurs fusils et à leurs côtés nous faisions la traditionnelle photo. Juste après avoir pénétré dans la salle des fêtes se dressait une petite table sur laquelle se trouvaient des gourmandises, dattes avec pâte d’amande accompagnées d’un verre de lait de chèvre. Exceptionnellement pour les français à gauche de l’entrée il y avait un bar avec des boissons alcoolisées. Nous pouvions nous installer où nous voulions, mais il était préférable de rester entre français, ne maîtrisant ni le berbère ni l’arabe, bien que nombre d’entre eux parle le français, mais nous étions les seuls à consommer de l’alcool. Il y avait un grand orchestre d’une trentaine de musiciens et par moment un groupe de cinq musiciens passait entre les tables s’arrêtant exhibant leurs danses et chants s’inclinant suffisamment pour mettre en évidence les pourboires que les convives glissaient sous leur fez ou tarbouche (chapeau marocain rouge), une incitation à faire la même chose. Pour faire l’intéressant, je pris le chapeau d’un de ces troubadours avec les billets qui dépassaient et je les accompagnais en dansant d’une manière extravagante et maniérée. Nous étions plus de 200 personnes, peut-être même 300. Il y avait de partout de grands écrans de télévisions retransmettant la cérémonie, la table de la mariée et autres évènements particuliers. Ce n’est que vers les 23 heures que la mariée fit son entrée. Elle est soulevée par des porteurs en cape blanche qui la faisaient valdinguer en rythme. Les youyous et les applaudissements résonnaient, des pétales de fleurs virevoltaient de toutes parts. Dans son plus bel apparat, elle ouvrit le bal. Dans la salle du mariage, il y avait une estrade surélevée surmontée d’un divan garni de coussins et de fleurs, assise douillette pour nos mariés et pour être admirés de tous. Cela a été l’occasion de me faire photographier à leurs côtés. Tout au long de la soirée, la mariée a changé 7 fois de robe et à chaque fois transportée et ballotée sur son siège (tapis) volant à la vue de tous. Elles ont toutes une signification. Puis il y a le défilé de la dote, ce sont les cadeaux de prestige que l’époux offre à sa dulcinée. En fait ce sont bijoux et autres articles de valeur que mon ami avait loué pour l’occasion de même que pour les robes de mariée. Le faste a son importance. Puis vient le rituel du henné. Une hennaya (tatoueuse au henné) tatoue les mains et les pieds de la mariée. Les caméras filment la scène et les femmes entonnent des chants traditionnels. Puis, vers la fin de la soirée, la pièce-montée fait son entrée, le couple est affairé à découper la pièce en pièce. (Oh que je suis drôle !) Enfin au petit-matin un potage, à l’instar de la soupe à l’oignon française, vient clôturer la fête.
Je ne sais plus si c’est avant ou après le mariage que nous sommes allés visiter le village et la maison des parents de la mariée dans un petit village berbère en montagne. Les maisons sont délabrées, on dirait presque des ruines. Ils vont se ravitailler en eau en bas du village avec l’âne. Nous sommes bien accueillis avec le traditionnel thé à la menthe. Je constate que malgré tout il y a la télévision à écran plat. En sortant je constate effectivement que les maisons ont pratiquement toutes une parabole. Mais le clou de la visite sera manifestement le minaret pimpant étincelant, radieux au milieu de ces maisons délabrées.
Mon ami, lui habitait dans un immeuble qui venait tout juste d’être construit, semble-t-il. A l’extérieur il restait encore du sable et quelques sacs de ciment. C’est la première fois que je vois un bâtiment construit de la sorte. Déjà le hall d’entrée ainsi que les encadrements de porte des appartements sont inclinés parfois à droite parfois à gauche mais rarement d’aplomb. Il faut dire qu’à l’extérieur il y avait aussi des reliquats de bouteille vide, servaient-elles de niveau ? Dieu seul le sait. En fait quand vous vous déplaciez dans l’appartement vous ne saviez pas si c’était vous qui étiez bancale ou la maison. Le sol paraissait bien plat à l’horizontal mais les murs, les portes penchaient, c’est assez bizarre comme sensation. Dans la salle de vie, qui était assez spacieuse, il y avait dans un coin une sorte de lave main. Alors je ne sais pas si c’est la tradition qui veut cela, mais en ce qui me concerne c’est la première fois que j’observais un tel aménagement.
Une relation indescriptible, mon cheval. J’ai toujours eu envie de monter à cheval. L’opportunité se présenta quand un centre équestre s’installa juste en face de mon lieu de travail. Dès son ouverture je m’y suis inscrit. Durant 9 mois, à raison de 2 fois par semaine, je suivais les cours d’équitation. Comment aborder les chevaux, mettre un licol, attacher le cheval, le panser, l’étrier, le bouchonner, mettre le filet et l’ajuster. Enfin, les exercices en la carrière, c’est un espace découvert où nous pouvons nous entrainer suivant les conseils de la monitrice : exécuter une diagonale, doubler dans la largeur ou dans la longueur, une volte ou ½ volte … contrôler la vitesse, changer d’allure, le pas, le trot, le galop, le changement de pied et le saut d’obstacle. Les jours de forte pluie c’était des cours théorique sur : les règles élémentaires de sécurité, le montage et le démontage du licol, du filet et de la selle, des notions sur l’alimentation, des notions sur les soins quotidiens, des généralités sur l’anatomie, le squelette et les muscles du cheval … Ils organisaient des balades en extérieur pour la journée dans les monts du Forez, c’était cool.
Si j’ai suivi ces cours assidûment avec une fréquence assez soutenue, je voulais savoir si c’était, pour moi, une envie passagère ou une réelle passion.
La réponse, je fis l’acquisition d’un cheval. Je l’ai acheté à Salvizinet (42), il allait avoir 5 ans. C’est un trotteur français, mâle, alezan, né le 15/04/1992. Son nom : « Espoir de Salvi ». Je l’ai rebaptisé Eliot.
Son propriétaire me racontait qu’un jour à l’heure où il avait l’habitude de lui donner à manger, le cheval ne venait pas. Il dut se rendre sur place pour savoir ce qui se passait. Il l’aperçut immobile, figé. Il y avait une petite fille assise à ses pieds.
Avant d’avoir pu trouver un terrain sur Saint Paul d’Uzore, là où j’habitais, je l’ai installé à Montchouvet (63) dans un pré à la maison de campagne de ma mère. Je venais le voir tous les jours, finissant son débourrage. Il était encore un peu sauvage. L’animal mesurait 1.65 m au garrot, fin et musclé. Et c’est là que j’ai commencé son dressage.
Vu mon tempérament à ne pas faire les choses à moitié, je me suis constitué une bibliothèque d’une trentaine d’ouvrages. J’étudiais les types d’équitation qui existaient de par le monde, de l’équitation western à la haute école du cadre noir. Je lisais l’expérience de cavaliers tels que Jack Brainard, Pat Parelli, Philippe Karl et Michel Henriquet, de celui qui pratiquait la chasse à courre au cowboy qui gardait le bétail. Des ouvrages sur la psychologie du cheval comme celui de Danièle Gossin. Faisant la synthèse de tout cela, je me suis fait ma propre méthode d’apprentissage et d’approche.
Au début, tout en lui parlant, je lui apprenais par des gestes ou en le touchant, à prendre mon chapeau s’il était tombé par terre, à ramener son seau qui servait à le nourrir, puis à saluer en mettant un genou au sol et en courbant son encolure, à se cabrer, à faire le pas espagnol, à faire des bisous … et à se coucher. Il faut savoir que le cheval à une mémoire, comment dire, environnementale. Je m’explique, ce que vous lui apprenez quand vous êtes à sa droite, il ne le fera pas nécessairement systématiquement si vous êtes à sa gauche ou quand vous le montez.
Avec le temps, le fait d’associer un mot à une action, il suffisait de parler pour qu’il fasse ce que vous souhaitiez. Si vous lui disiez « Bonjour », il vous faisait une révérence, « Debout », il se cabrait, « Bisou », il tend son encolure et vous présente ses ‘babouches’ ou encore « Couché », il se couchait. Couché, je le caressais affectueusement, je me couchais à ses côtés la tête sur son flan. Il se relevait avec moi sur son dos. Les gens qui passaient près de chez nous et qui connaissaient Eliot, le saluaient et il répondait à leur salut.
Nous avions un respect mutuel, quand j’allais au pré, je n’avais pas besoin de l’appeler, il venait vers moi. J’avançais, il avançait à mes côtés, juste un peu en arrière de moi, si je reculais, il reculait, si je courrais, il courrait et si je pilais, il s’arrêtait net. Il m’arrivait de jouer à cache-cache, je me planquais derrière un arbre, un abri, puis je l’appelais et il me cherchait.
Malgré tout cela, le plus beau de notre relation auront été les balades à travers champs, bois. Au début je sortais avec les cavaliers du coin, ils avaient une connaissance des chevaux, parce que certains ont vécu à la ferme et depuis leur enfance ont été contact avec les chevaux. Ils n’ont toutefois pas appris à monter à cheval, certains montaient à cheval comme sur un vélo, pas de respect, de la brutalité et j’en passe. Nous partions avec le casse-croute et surtout on entendait les bouteilles de rosé qui s’entrechoquaient dans les sacoches. Je ne suis pas sortie longtemps avec eux. Je préférais partir seul avec mon Eliot.
Le cheval est de nature craintif, peureux. S’il y a quelque chose d’inhabituel sur le chemin, il a tendance à faire un écart ou bien il tremblote, ne veut plus avancer. Mais il est curieux et si vous prenez le temps et le laissez faire, de lui-même il va s’approcher de l’objet de ses appréhensions et comprendra qu’il n’a rien à craindre. Il retiendra cette péripétie et acquerra de l’expérience. Pour cela il vous faut de la patience. Au début, par exemple, il avait peur des flaques d’eau, avec le reflet du ciel il avait de la difficulté à en apprécier la profondeur, pour lui cela semblait être un gouffre, alors il pouvait s’écarter violement. Si nous devions enjamber un petit ruisseau, il préférait carrément le sauter. Alors que par ailleurs si nous devions traverser un large cours d’eau où il pouvait plus facilement en évaluer la profondeur, il aimait s’arrêter au milieu du gué et frapper l’eau à la surface et il nous aspergeait par la même occasion. En été c’était plutôt sympathique cela nous rafraîchissait par contre en hiver … Tout cela demandait donc de ma part beaucoup d’anticipation de ses réactions. J’étais si proche de lui que je ressentais la moindre de ses angoisses. Ayant une vue tridimensionnelle limitée (120°), les chevaux ont une difficulté à apprécier la distance des phénomènes qui ont lieu de part et d’autre de ce champ de vision. C’est pourquoi, par moment, il réagissait à des évènements lointains comme s’ils étaient proches. Ainsi, de la même manière qu’il m’indiquait qu’il se passait quelque chose d’insolite, je faisais la même chose, quand je percevais quelque chose qu’il n’avait pas vu. Une complicité s’était établie entre nous.
Si bien qu’un jour, dans les bois du Roy, j’aperçus au loin un faon. Il était à une cinquantaine de mètres de nous et nous regardait tranquillement. Dans un premier temps, je stoppe mon cheval et attire son attention vers ce petit animal. Je me dirige vers lui calmement et m’arrête de nouveau. Nous étions à une vingtaine de mètres et la bichette nous observait étonnamment. Nous nous approchons encore un peu plus, une dizaine de mètres, sans aucune réaction de sa part. Je descends lentement et avec soin de mon cheval et, le tenant par les rennes, je poursuis mon approche, cinq mètres, deux mètres, un mètre. Je me mets alors à quatre pattes pour finalement positionner mon nez à un centimètre de son museau. Nous sommes restés dans cette position quelques dizaines de secondes. Je ne l’ai pas touché par peur que sa mère le rejette. Eliot, impatient ne put s’empêcher de le renifler, il partit aussitôt. Je crois que ce que j’ai vécu ce jour est rarissime et n’aurait pas pu être possible sans la présence de mon cheval, Eliot.
Une autre fois, il refusait d’aller à un certain endroit et n’en comprenant pas la raison, j’insistais. Cédant à l’autorité parentale, on s’est retrouvé si bien embourbé que son ventre touchait le sol. Sentant un affolement naissant, tout en descendant, je le calmai. Je fis le tour cherchant par où l’on pourrait repartir. Ayant identifié le passage adéquat, je l’ai encouragé énergiquement et il se sortit du marais. Ce qui était agréable lors de mes sorties avec Eliot en automne, c’étaient les petits galops ramassés sur les chemins dans les sous-bois. Le sol tapissé de feuilles qui voltigeaient de toutes parts à notre passage. Avec son petit galop léger, aérien, j’avais l’impression de voler. Il nous arrivait de quitter les chemins en terre battue pour nous faufiler dans d’étroits sentiers et finalement nous retrouver à travers bois. Je devais bien tenir mon cheval, car n’ayant plus de référence au sol, il avait tendance à partir dans tous les sens. Nous enjambions ou sautions les troncs d’arbres morts. Ma femme appréhendait quelque peu mes sorties car il arrivait parfois que je rentre à la maison le chemise déchirée dans le dos. En théorie un cheval au galop perd pratiquement 20 centimètres en hauteur, et par moment quand je devais passer sous des branches relativement basses et bien sûr méjugeant de ma capacité à passer en dessous sans frotter, je mettais mon cheval au galop pour m’assurer du passage, une fois sur dix je laissais une partie de ma chemise accrochée aux branches des arbres.
Autre chose, si vous êtes un homme et que vous voulez monter a cru, je vous conseille de faire du pas ou du galop mais surtout pas du trot, au trot les bijoux de famille se cognent contre le garrot et vous finissez par pisser le sang.
Ma vie auprès d’Eliot m’a appris à être indulgent avec les autres. A être longanime, attentif, modéré, à faire preuve de discernement, si votre cheval ne comprend pas ce que vous lui enseignez, c’est à vous de vous remettre en question, de revoir votre approche, votre méthode d’apprentissage, etc…
Une autre de mes passions est le snowboard. J’ai commencé le ski tardivement sur les pistes de Chalmazel. Ma compagne, qui est née avec des skis aux pieds, était mon instructeur. Je commence sur la piste pour les enfants « l’ourson », je vire à droite à droite, flexion, extension, etc… Surestimant mes capacités, elle m’emmène « aux cimes », piste bleu et le même jour au « banban », petite piste noire. Quand j’ai vu la piste, j’en aurai pleuré, c’était impossible pour moi que je puisse descendre par là. J’ai fini par déchausser et rentrer à pied jusqu’à la station.
C’était le début des années 90, le snowboard commençait à se répandre. Nous nous mettons à cette nouvelle discipline de glisse. Et là nous avons tous le même niveau. Les mêmes galères, fautes de cars, chutes en tout genre. On progresse vite, trop vite. On prend de l’assurance, des risques. On pense bien maîtriser la chose. J’investis dans un snow alpin asymétrique pour faire de la vitesse, de grandes courbes et des sauts en longueur. Descendant un peu rapidement, un skieur en aval vire à gauche puis à droite, pensant qu’il allait virer de nouveau à gauche, je m’apprête à le dépasser sur la droite. Le problème est qu’il s’arrête sur la droite fermant le passage. Impossible de m’arrêter ou de virer à gauche, je freine au maximum et finis ma course à droite dans un ravin de rocher. Le skieur ne s’en est même pas aperçu, il est reparti tranquille. Moi, je suis tombé la fesse sur une pierre quelque peu saillante. Je suis reparti, descendant en « crabe ». Je souffrais énormément, je me suis allongé et perdu connaissance quelques secondes et continué à pied ma descente. J’ai eu un bleu qui partait du haut de la fesse gauche jusqu’à la moitié de la cuisse sur une longueur d’au moins 40 centimètres par 15 centimètres de large. Avec ma compagne et ses frères, nous faisions pas mal de hors-piste. C’était un réel plaisir de partir dans une neige immaculée laissant sa trace. En règle générale nous allions à des endroits où il n’y avait personne, vous entendiez seulement le bruit de votre snow qui se fraie un passage au travers des rochers ou qui provoque une gerbe de neige lors d’un virage un peu serré. Un plaisir indescriptible. A la recherche de fortes sensations, nous partions d’endroits où sur plusieurs mètres le snow ne touchait pas le sol. Déclencher une avalanche, attaquer une descente à partir d’une crête où la neige était séparée du sol d’une trentaine de centimètres … Ce n’était pas très malin. Nous étions tellement accros à ce sport notamment en ce qui concerne le hors-piste que l’été nous allions sur la station dans la forêt, équipés de haches et de scies, tracer un parcours. Nous marquions à la peinture sur les arbres le passage à suivre, nous coupions les branches gênantes et dangereuses et dans certains cas nous abattions carrément des arbres. Quand nous pratiquions cette descente, c’était très technique, il fallait être vif, nerveux, nous descendions tellement vite que parfois pour négocier certains virages j’étais obligé de m’accrocher aux arbres pour pouvoir tourner. Mais l’adrénaline était là.
Un autre sport de pleine nature et de glisse, mais là, dans les airs : le parapente. J’ai commencé ma formation au Puy de Dôme. Pour pratiquer ce sport, il faut acquérir des connaissances sur le matériel, les bases du pilotage et la météo. Après avoir examiné en détail le matériel. La voile, constitué de l’intrados et de l’extrados, panneaux cousus entre eux par l’intermédiaire de caissons. Les suspentes, il en existe un nombre important ancrées sur la voile. Plusieurs petites convergent vers des plus grosses, à la manière d’un arbre, avant d’être fixées sur des sangles dénommées élévateurs qui sont, eux même fixés à la sellette. Les élévateurs permettent en vol de modifier le profil de la voile, comme les commande de freins servant à tourner ou freiner sa vitesse. La sellette, un élément de sécurité important, tout comme le casque et de bonnes chaussures montantes.
Si le temps le permet, nous allons débuter notre apprentissage en pente école. C’est sur cette pente que sont acquis et perfectionnés les gestes de mise en œuvre et de contrôle du parapente. Son profil, la nature du sol, l’exposition aux vents dominants. Elle permet les premiers décollages, contrôles de caps et atterrissages. Nous commençons par des séances de gonflage, le but étant de maintenir la voile au-dessus de la tête afin d’en examiner les éventuels problèmes, nœud dans les suspentes, branche emmêlée … contrôle essentiel avant tout décollage.
On monte une vingtaine de mètres dans la pente, on étale proprement notre voile, on aligne les suspentes, on enfile et boucle la sellette, on contrôle le harnachement, on se tourne vers la voile et l’on fait un petit test de gonflage pour voir si tout est ok et on la repose délicatement. Puis de nouveau face à la descente, les élévateurs dans les mains, au signal du moniteur, on court, la voile s’élève et tout en courant, nous vérifions la qualité de notre aile. Dès que la voile est au-dessus, nous lâchons les élévateurs et gardons en main seulement les commandes de frein, l’objectif étant que la voile ne nous dépasse pas ou au contraire soit trop en arrière.
Après quelques exercices, nous montons une vingtaine de mètre plus haut. A chaque fois nous remontons la pente avec la voile en vrac dans les bras, c’est physique. La différence, à partir de cet emplacement, est que nous allons décoller, nous élever dans les airs de deux, trois mètres, mais suffisamment pour accorder toute notre attention à l’atterrissage. Accélération et freinage en douceur. Lors de cet exercice, il y a eu une petite rafale ascendante et je me suis retrouvé en une fraction de seconde, à 50 mètres au-dessus de sol. Un peu affolé, je me demandais bien comment j’allais faire pour redescendre. J’ai atterri plus au milieu des vaches, ayant pris soin d’avertir celle-ci de ma présence, faisant un maximum de bruit secouant ma voile dans tous les sens, avant de me poser.
Nous reculons de nouveau d’une vingtaine de mètres, et là, restant un peu plus longtemps en l’air, nous apprenons à virer à droite et à gauche.
A d’autres moments, en plaine, c’était les séances de gonflage, face à notre à notre voile les commandes inversées, on élève la voile et on la maintien le plus longtemps possible en l’air, comme un cerf-volant.
Mais avant d’aller plus loin, il faut acquérir d’autres notions indispensables avant de faire le grand saut. Ne serait-ce que la reconnaissance aérienne du terrain d’atterrissage, la détermination du sens du vent, la construction de l’approche, l’étape de base avant le dernier virage et enfin la prise du terrain en ‘S’ ou en ‘U’. Un autre aspect important, la météorologie, l’étude des phénomènes atmosphériques, l’aérologie, l’étude des phénomènes dynamiques et thermiques des masses d’air. Un domaine passionnant. Comprendre comment les déplacements des grandes masses s’affrontent. Le rôle de la chaleur, principal moteur des mouvements de l’atmosphère. Les modes de transmission de la chaleur, le rayonnement, la conduction et la convection. La pression atmosphérique variant en fonction de la chaleur et de l’altitude. Un air qui se détend se refroidit. A l’inverse un air qui se comprime se réchauffe. L’humidité, qui se présente sous trois formes : de vapeur, de liquide et de solide. C’est la température qui modifie l’état de l’eau sous ses différentes formes. La chaleur transformera l’eau en vapeur (évaporation) et un refroidissement en solide (condensation). Ainsi tout ce qui accentue les différences de température, déstabilise une masse d’air et tout ce qui atténue la stabilise. Les nuages ont une grande importance. La plupart renseignent finement sur l’état des masses d’air. Il peut être vital de les reconnaître (cumulonimbus). On distingue trois étages : de 0 à 2000 m ; de 2000 à 5000 m (alto) ; de 5000 et + (cirro). Et deux types de nuage (A quelques exceptions près) : Les stratus, une nappe de vapeur d’eau uniforme, et les cumulus, en forme de chou-fleur. Nous apprenons à lire une carte météorologique, les hautes pressions (anticyclones), les dépressions, les fronts … Nous apprenons à déterminer les écoulements de l’air sur les reliefs et ses conséquences. Les turbulences dues aux obstacles (butte, rupture de pente, arbre, maison …).
Puis c’est le grand jour, on monte au Puy de Dôme, durant le trajet, je visualise le vol que nous allons effectuer : 800 mètres de dénivelé et je commence à appréhender. L’avantage de ce site et que nous pouvons décoller quel que soit le sens du vent. La règle est de décoller toujours face au vent. Mais là, étant donné que c’est un dôme, on trouvera toujours un endroit où nous serons face au vent. Il y a deux moniteurs, un qui assure le décollage et le guidage en vol et un autre en bas pour l’atterrissage. Nous sommes équipés de talkie-walkie. R.A.S. (Rien à signaler) c’était nickel. La prudence était de rigueur.
Suite à ce stage, j’achète une voile d’occasion pour débutant (dite ‘camion’). Et dans le pré d’Eliot, je m’exerçais à faire du gonflage. Le vent était souvent irrégulier, tournant. Des conditions difficiles pour maintenir sa voile. Rapidement je suis devenu un expert en la matière, si bien que lors du stage suivant, lors de séance de gonflage, le moniteur venait vers moi et tirait sur mes élévateurs pour affaler la voile et moi à chaque fois je la redressais, c’était comique.
Dans la pente école, alors que les autres élèves remontaient chaque fois la pente avec leurs voiles dans les bras, moi, je gardais ma voile en l’air et j’utilisais le vent pour remonter tranquillement la côte.
Finalement, j’ai passé mon brevet de pilote. J’ai pris une licence au club de Montbrison. C’est indispensable pour avoir l’assurance risque civil aérien. Et j’ai commencé à faire quelques vols en autonome. Globalement, quand on réunit toutes conditions, météorologique, aérologique, il n’y a aucun danger de pratiquer cette discipline.
Les seules fois où je me suis fait peur, c’était de ma faute. Une fois, j’étais seul à l’atterrissage, j’attendais qu’il y ait d’autres libéristes pour monter au décollage. Il est préférable d’être à deux voitures, une reste en bas afin de récupérer l’autre restée en haut. Enfin deux libéristes arrivent, le ciel est légèrement couvert, on monte, on prépare nos voiles, je les laisse partir en premier, par courtoisie, m’ayant transporté ; la masse nuageuse est descendante, la fenêtre de vol n’est pas terrible. Je décide de partir quand même, je me trouve instantanément dans un nuage, tout est gris, en haut, en bas, à droite, à gauche, je ne sais plus si j’avance ou si je recule, si je monte ou si je descends. Je me raisonne, je me dis « garde ta voile bien droite et si dans les 5 minutes qui suivent tu ne vois pas la crête des arbres, tu descends et tu atterris là où tu pourras, probablement dans les arbres ». Après quelques minutes, « ouf » j’aperçois les arbres et je poursuis ma descente. Ma voile s’est alourdie considérablement en raison de l’humidité du nuage. Il faut savoir qu’entre l’aire de décollage et d’atterrissage, il y a une colline. Je suis passé de justesse à quelques centimètres des arbres.
Une autre fois, je suis parti avec un vent de face trop puissant, au lieu d’avancer, je reculais avec le risque de me trouver sous le vent (synonyme de turbulence maximum, fermeture de voile, la cata !). Par chance, j’avais mis en place l’accélérateur. C’est une barre reliée à certaines suspentes qui modifie le profil de la voile permettant une pénétration dans l’air mais avec un taux de chute plus important. Je me suis mis debout, les pieds sur la barre de tout mon poids. J’avançais de nouveau « ouf ».
Une autre fois encore, au Puy de Dôme, j’ai décollé avec une clé. C'est-à-dire, deux suspentes qui se sont emmêlés. Ma voile tire à droite, me dirigeant directement dans les rochers. Je compense vigoureusement ma trajectoire et me dirige sans détour au terrain d’atterrissage « ouf ». Juste un mal à l’épaule gauche pour avoir tiré comme un malade sur ma commande de frein durant la descente.
Les décollages sont toujours délicats et à appréhender avec prudence et sérieux, mais une fois que vous êtes dans les airs c’est la liberté, une sensation de bien-être. Vous entendez seulement l’air glisser dans les caissons de la voile comme si elle respirait. Vous accompagnez les oiseaux qui tout comme vous recherchent les ascendances pour planer et se maintenir en l’air. Votre vision parait irréelle, vous contemplez le paysage sous des angles différents, vous découvrez des zones inaccessibles à pied observant la vie animale sauvage, chamois, bouquetins, cerfs …, vous survolez des sites escarpés, des crêtes enneigées, vous volez le long de falaises où seuls quelques oiseaux ont construit leurs nids et nourrissent leurs progénitures. Une autre manière de faire du parapente, qui me plaisait, sont les vols en statique. Ce sont des sites un peu comme une pente école, vous avez un vent de face légèrement ascendant, laminaire et régulier. Vous louvoyez à ras du sol, vous pouvez presque le toucher de la main, vous faites flirter le bout de votre aile avec le terre, un coup à droite puis à gauche. C’est un peu technique, mais trop top !
Comme je l’ai indiqué, un de mes hobbies sont les minéraux. Un collègue de travail m’a insufflé cette passion. Mon ex-épouse a un membre de sa famille qui travaillait dans les mines de cuivre à Ussel en Corrèze, dans le Limousin. Lors d’une visite, il m’offrit une pyromorphite. C’est une pierre verte, qui ressemble à de la mousse mais ce sont des cristaux. Quand on la voit on n’imagine pas qu’elle a été sortie à coup de marteaux piqueurs. Ce n’est pas une pierre précieuse, mais elle est rare d’autant que la mine est fermée depuis déjà quelques années. Quand je l’ai montré à mon collègue, il était fou ! Il voulait absolument l’avoir dans sa collection et était prêt à me donner en échange tout un ensemble de pierre que je n’avais pas. Alors j’ai cassé un petit morceau pour moi et ai échangé le reste. Je m’étais documenté sur les sites minéralogiques de France et de temps à autres je me déplaçais, espérant trouver la pépite rare. A l’aide d’une vieille brochure écrite par un curé, j’ai retrouvé l’emplacement d’une vieille mine de stibine. L’entrée se devinait derrière un arbuste sur le flan d’un pré en pente. Pour pénétrer à l’intérieur, il faut se mettre à quatre pattes. On arrive dans un premier espace où l’on peut se mettre debout, il fait sombre, l’endroit est humide. Pour continuer, muni d’une lampe torche, je me dirige dans une pièce et là tout au fond, il y a un éboulis et au-dessus un passage très étroit, il me semble qu’il y a de la lumière. Je parle à ma compagne que j’envisage d’aller plus loin. Et là je me rends compte qu’il faut que je chuchote, ma voie raisonne dans la cavité, c’est assez impressionnant. Je m’engage à plat ventre dans les éboulis et me hisse progressivement dans un autre compartiment plus vaste et effectivement j’aperçois, à un peu plus de 50 mètres au-dessus de moi un orifice, le ciel. La galerie avait subi un effondrement assez conséquent. Il n’est pas question de rester plus longtemps. Il y a une petite veine de cristaux de stibine, j’en récupère un morceau et file vers la sortie sans trop faire de bruit car je sens qu’il ne faut pas grand-chose pour que tout s’écroule sur moi. Voulant vérifier à quoi correspondait ce que j’avais observé à l’intérieur de la galerie, on se rend au-dessus. Et là nous apercevons à deux endroits espacés d’une vingtaines de mètres deux crevasses d’environ deux mètres de diamètre, qui piquent à la verticale 50 mètres plus bas. Si vous vous promenez et que vous êtes quelque peu distrait, vous vous retrouvez 50 mètres plus bas sans rien comprendre. Ces fosses ne sont ni indiquées ni balisées. C’est hyper dangereux.
Depuis mon enfance j’ai toujours été passionné par les étoiles. J’ai passé une année entière à observer le ciel et ce, 2 ou 3 fois par semaine. Nous partions sur le coup des 22 heures en direction de St Anthème. Notre site de prédilection était le col de Baracuchet. C’est un col de montagne situé dans les monts du Forez (Massif central). À une altitude de 1 264 mètres. De là nous partions en voiture à travers les plateaux sur des chemins plutôt cahoteux avec des ornières invraisemblables. Quand j’y repense, j’ai eu beaucoup de chance de ne pas être resté coincé en pleine nature avec ma 205, qui plus est avec la voiture de la société ! Observer les étoiles en altitude a un avantage, le ciel n’est pas pollué par les éclairages des villes, mais cela a aussi un inconvénient, il y a beaucoup trop d’étoiles. Je m’explique, quand vous en altitude moyenne à 400 mètres, par exemple, et en ville, vous ne voyez que les étoiles les plus lumineuses qui sont facilement reconnaissables, mais en altitude, une nuit sans lune, vous êtes complètement désemparé par le nombre impensable d’étoiles qui apparaissent devant vous et qui de plus ont pratiquement la même magnitude (luminosité). Cela devient difficile de distinguer les différentes constellations, les principales étoiles, galaxies et les planètes mais avec le temps vous devenez un expert en la matière. L’observation en continu sur une période d’un an vous permet de vous familiariser avec les constellations car suivant le moment de l’année et l’heure d’observation, elles n’ont pas les mêmes formes et grandeurs. Au début nous observions le ciel à l’œil nu, c’est déjà énorme ce que vous pouvez voir, puis nous essayons avec les cartes astronomique de déterminer le positionnement des constellations en apprenant le nom des étoiles les plus importantes et ce qui les caractérise, le Bouvier avec Arcturus et la Couronne sur sa gauche, la Lyre avec Véga, le Cygne avec Deneb puis Pégase et bien d’autre encore. Mais avec Pégase il y a Andromède, nous arrivions à peine à la distinguer à l’œil nu. Alors là avec les jumelles à l’endroit exact où nous avions supposé son existence cela a été un choc émotionnel, nous en avions la chair de poule. Cette galaxie en spirale, comme dans les livres, c’était grandiose, magnifique, émouvant.
Cependant c’est le mercredi 11 août 1999 à 10h20 que nous avons vécu un grand moment émouvant de notre vie d’astronome amateur. Il s’agit de l’éclipse totale de soleil. Nous sommes partis de Montbrison sur Paris, arrivés sur un des sites où l’éclipse devait être visible, le ciel était couvert. Nous décidons donc de poursuivre sur l’autoroute et sur la trajectoire de l’éclipse. La tension était palpable, nous accélérons le rythme puis subitement les nuages se dispersent et à quelques kilomètres de là, nous voyons une entrée d’autoroute pour les véhicules de service. Nous nous arrêtons là, il y avait déjà quelques badauds comme nous, en attente. Equipés de nos lunettes, nous sommes aux aguets. Ca y est, la lune est en train de grignoter le soleil, le vent se lève, la température commence à baisser mais la luminosité est intacte. Puis la lune recouvre à 95% le soleil, la lumière est toujours aussi forte, il faut garder les lunettes. Et là c’est le top, l’éclipse est totale, il fait nuit, les étoiles réapparaissent, l’horizon tout autour est orangé, une émotion sans pareil gagne l’ensemble de la foule présente, émerveillés comme de petits enfants, certains rient de joie d’autres versent une petite larme. Durant ces quelques minutes nous sommes certes déconcertés mais unis, une sorte de communion avec un profond sentiment d’humilité. Puis le jour se lève, les gens applaudissent … le vent souffle de nouveau, la température remonte et la vie reprend son cours.

UNE TRAHISON PREVISIBLE DE MON ‘AMIE’

On s’était promis de tout se dire. Que s’il y avait les moindres soucis, on met les choses à plat et si l’on devait se séparer eh bien on se séparerait. Je savais pertinemment qu’un jour ou l’autre nous allions nous séparer, nous avions 16 ans de différence d’âge.
Au bout d’une quinzaine d’année, nous partagions de moins en moins d’activités en commun, elle éprouva le désir de faire du handball et c’est ainsi qu’elle fit la connaissance de son futur compagnon. Ils eurent des relations et elle chopa une M.S.T (Maladie Sexuellement Transmissible) et de ce fait, voulait que je mette un préservatif sous prétexte de connaitre les sensations que cela pouvait provoquer… je ne sais quoi, sans vouloir me donner la véritable explication. Subitement, elle ne voulait plus dormir dans la même chambre, prétextant que mes ronflements nocturnes (après 15 ans) la gênaient. Je la soupçonne même de m’avoir donné du bromure dans la nourriture. Après notre séparation, j’ai retrouvé un flacon, elle voulait certainement affecter ma libido pour que cela devienne une raison de séparation. Elle n’a jamais avoué sa liaison avant notre séparation. Cependant, le jour où je lui ai rendu des livres qui étaient restés à la maison. Son compagnon en reconnu un, jurant par tous les dieux qu’il lui appartenait. Je levai les yeux et regarda mon ex-compagne et elle comprit que j’avais là la preuve de ses mensonges et de sa tromperie. Malgré le mal qu’elle m’a infligé, je ne lui en ai pas tenu rigueur. Je fis comme si de rien n’était. Elle continua à travailler à mes côtés dans ma société.

LA REINE DE SABA RENTRE DANS MA VIE.

Je prenais des cours de danse de salon avec une voisine en tout bien tout honneur. Je sortais peu et les femmes que je rencontrais ne m’intéressaient pas. N’ayant pas beaucoup de temps, le travail prenant une place importante, je me suis inscrit sur le réseau social Meetic. Comme, tout un chacun, je construis mon profil et rapidement des flashs se manifestent. En ce qui me concerne, j’observe ce qui se passe.
L’application me propose des profils pouvant me correspondre. Trois, quatre femmes s’intéressent à ma personne. Nous échangeons jusqu’au jour où l’une d’entre elle me conseille de rester en contact avec une seule d’entre elle, car chemin faisant, si je devais rompre avec elles et me lier avec une, les autres pourraient souffrir, après s’être attachées. Je prends acte et aussitôt je me fixe sur la première qui était entrée en contact avec moi, avertissant les autres de ma décision et de la raison.
C’est ainsi, quand quelques mois, je fis la connaissance de ma future femme. De son côté, elle avait été inscrite sur Meetic par l’une de ses amies à son insu. Mais elle est devenue vite accro à ce site de rencontre. Elle remarqua qu’un beau jeune homme, (moi) venait sur son profil, sans dire un mot. Puis un jour, elle vit une nouvelle photo.
Je suis assis sur ma terrasse, regardant par-dessus mes lunettes la personne qui me prend en photo, avec mes beaux yeux bleus, elle craque. Elle déclara à ses copines : « Je veux que ses yeux se posent sur mon corps pour le reste de ma vie ». Elle vivait sur Paris et quand elle vit que j’habitais à Saint Paul d’Uzore, un coin perdu près de Montbrison. Elle se dit que jamais nous pourrions nous rencontrer, sortir ensemble.
Au début, nous communiquions seulement par courriel. D’une part, cela me permettait de prendre mon temps, pour lui écrire des mots et des phrases de choix, et d’autre part, le temps d’analyser ses écrits pour savoir où je mettais les pieds. Elle, au contraire, voulait absolument entendre le son de ma voix.
Au bout de quelques mois, je lui donne mon numéro de téléphone et rapidement elle tente de m’appeler sans succès et laisse un message son mon répondeur du style « Salut, c’est moi ! ». Bien que je trouve que ses photos ne la mettaient pas en valeur, c’est une très belle femme à la peau couleur ébène. Mais alors sa voix ! Vous savez ces voix de certaines standardistes à la voix suave, douce, sucrée … où vous vous faites un film. Eh bien cela a été la même chose. Elle travaillait à la hotline de la R.A.T.P. (Régie Autonome des Transports Parisiens) traitant les doléances des usagers. Elle avait suivi des formations sur la manière de parler à la clientèle. Quand j’ai entendu le son de sa voix, j’étais comme un poisson qui a été ferré après avoir gobé l’appât. A partir de ce jour, nous communiquions par téléphone.
Je commençais davantage à la découvrir. Elle a vécu des moments difficiles dès son enfance avec son père qui la prenait pour une Pin-Up, sous estimant ses capacités, il l’humiliait jusqu'à la frapper. Avec son premier mari, le père de ses trois enfants, elle a été battue et trompée. Un parcours chaotique, jusqu'à vouloir, à plusieurs reprises, mettre fin à ses jours. Une femme écorchée vif ! A chaque appel, j’étais ému et à la fois en ébullition, impatient et à la fois angoissé de pouvoir la rencontrer.
Pour les vacances d’été, elle me propose de passer une semaine avec elle sur Paris. La semaine précédente, je faisais un stage de parapente. Et là, autant elle était enthousiaste de me voir quelques jours auparavant, autant là, elle devenait hésitante. Avait-elle rencontré quelqu’un ? Avait-elle pris conscience que je n’étais pas la bonne personne pour elle ? Je pleurais. En fait, elle appréhendait notre rencontre, peut-être de ne pas être à la hauteur, de me décevoir.
Le fait est que je suis monté à Paris. En costume, un chapeau sur la tête, un nez de clown sur la figure, je sonne à la porte. J’ai la tête incliné pour qu’elle ne voit pas mon visage. Elle ouvre la porte, je me redresse lentement et nous éclatons de rire et nous nous embrassons. Cela a été le début de notre relation.
Je montais régulièrement à Paris pour mon travail, j’avais désormais un pied à terre. De temps à autre, c’est elle qui descendait à Saint Paul, elle se débrouillait pour avoir de longs weekends. Puis un jour à cause des grèves des trains, elle ne put rentrer à Paris. Bien qu’ayant eu un parcours irréprochable, jamais d’absences injustifiées, toujours à l’heure, son boss lui chercha des poux pensant qu’elle faisait partie des grévistes. Elle se mit en arrêt maladie. Ayant un contrat de travail lui permettant de prendre sa retraite, elle ne remit plus jamais les pieds sur son lieu de travail, si ce n’est un jour furtivement pour récupérer ses affaires.
Les débuts ont été difficiles pour moi. Vu son parcours, elle n’avait pas confiance dans les hommes. Elle était démesurément jalouse. Chaque fois que je rencontrais une de mes connaissances féminines, j’avais droit à des crises de jalousie, ce n’était plus vivable. J’ai mis les choses au point. Les larmes aux yeux, je lui ai expliqué que je comprenais son dur passé avec les hommes mais qu’il ne fallait pas tous nous mettre dans le même sac, que je voulais être heureux avec elle, mais que je ne pouvais pas concevoir vivre avec quelqu’un qui n’a pas confiance en moi, que si cela devait continuer de cette manière je préférais mettre un terme à notre relation. Cela a été le choc, elle sortit violemment de la maison et partit à travers chemins. À la tombée de la nuit, n’étant toujours rentrée, je suis parti à sa recherche en voiture. Elle s’était perdue dans la campagne ! Arrivé à sa hauteur, elle était désemparée, se demandant bien qui était en train de l’accoster. Rentrés à la maison, elle me fit la promesse que cela ne se reproduirait plus jamais et cela ne s’est plus jamais reproduit. Le lendemain, elle écrivit : « Mon amour, Bernard, pour la suite de notre conversation d’hier soir … Si nous décidons un jour de nous marier sache que je ne veux pas louper notre décision de vivre à deux, je ne veux pas te perdre. Je veux finir mes jours avec toi. Tu ne peux savoir combien je t’aime. Si ce jour devait arriver … que cette journée nous soit exceptionnelle comme l’homme que j’ai choisi : TOI. Je t’aime ». S’occupant au fur et à mesure de plusieurs fonctions, dont la comptabilité, dans la société, elle en devient la gérante. Pour le mariage, nous allons attendre. La loi française étant ainsi faite, étant salarié l’entreprise, si je suis marié, je n’ai pas droit au chômage. J’ai bien fait car cela s’est avéré nécessaire.
Durant nos temps libres, étant elle-même cavalière, nous partions faire des balades à cheval. Elle adorait Eliot, mon cheval, et passait beaucoup de temps avec lui. C’est avec lui qu’elle reprit confiance, ayant subi jadis un grave accident d’équitation (12 jours dans le coma). Nous habitions dans une grande maison à Saint Paul d’Uzore et en plus du terrain d’Eliot d’environ 3 hectares, la maison de 125 m² sur 2 étages (250 m² habitable) était sur une parcelle de 1 000 m². Ma chérie s’occupait, en plus de la décoration et du ménage, elle se chargeait d'aménager et de mettre en valeur l'extérieur, le jardin et les espaces verts.
Du côté ouest de la maison, il y avait une plate-bande de huit mètres de large qui donnait sur la cuisine. Là nous avons décidé de faire un bassin. Nous commençons par décaisser le sol sur une surface de deux mètres de large sur un peu plus de quatre mètres et d’une profondeur de 70 centimètres. Après quoi nous avons placé une épaisse bâche noire. J’équipais ce bassin d’un filtre équivalent à une petite piscine avec un filtre de sable et d’une lampe UV pour détruire certains micro-organismes nuisibles. Sur le fond une couche de sable et sur les bords un muret de pierre où se cachais l’aspiration de l’eau dans un petit bac intermédiaire séparé par un fin grillage et amas de pierre pour empêcher les petits poissons de passer. Un des côtés était surélevé, cela nous permettait de mettre toutes sortes de plantes aquatiques qui vivent entre deux eaux et de l’autre côté une cascade où l’eau filtrée arrivait. Sur un des bords se cachaient la pompe et le filtre dans une cabane en bois avec une bonne isolation phonique. La clarté de l’eau impressionnait les personnes qui nous rendaient visite. Nous n’avons pas acheté de poissons, nous demandions à nos amis quand ils nous rendaient visite d’apporter leur poisson rouge, un poisson par couple. Qui plus est, il devait leur donner un nom sur la base des lettres de leurs prénoms. Ainsi se constituait petit à petit la vie animale de notre bassin. La première année nous avions une dizaine de poisons et la suivante une centaine. Quand c’était le moment de la ponte, les femelles étaient coursées inlassablement par les males. J’avais l’habitude de leur donner à manger le matin vers 9 heures. Ils venaient sur le bord du bassin et attendaient leurs pitances. Ils n’avaient pas besoin de cela mais c’était pour moi un plaisir. Je pouvais leur donner la nourriture directement dans la bouche, je pouvais même les caresser. Je leur avais donné l’habitude de venir dès que je mettais la main dans l’eau, au début je les attirais avec de la nourriture puis au bout d’un moment c’était devenu un reflex. Cela faisait le bonheur des enfants.
Les oiseaux venaient s’abreuver régulièrement, des rouges gorges, par moment un merle, un moineau, une sitelle, un troglodyte, c’est un tout petit oiseau avec sa petite queue dressée en permanence qui se faufile entre les cailloux à la manière d’un petit rongeur rendant son observation difficile, puis il y a la mésange, d’une part la charbonnière avec son béret d’un noir intense et un plumage multicolore harmonieusement réparti, jaune, blanc, noir et vert et d’autre part la mésange bleue, un peu plus petite que la charbonnière et sans le béret, mais avec un capital de sympathie aussi élevé que sa vivacité. Je décidai donc d’installer une mangeoire contre la cabane. Disposant toutes sortes graines et boules de graisse, chacun son tour ils venaient faire le plein d’énergie. Je les observais par la fenêtre de la cuisine mais dès que je sortais ils s’envolaient. Alors pour les observer de plus près je me cachais à l’angle de la maison, il n’y avait que ma tête qui dépassait. Ils savaient que j’étais là, il y en avait toujours un qui prévenait les autres. A la longue, ils se sont habitués à ma présence, surtout qu’ils se rendaient bien compte que c’était moi qui alimentais la mangeoire. De fil en aiguille, je m’approchais de plus en plus et je remarquais que les mésanges bleues étaient les moins peureuses et que leurs aliments favoris étaient les graines de tournesol. Alors j’ai enlevé les graines de tournesol de la mangeoire et en disposais quelques-unes sur le bout d’une planche d’environ 3 mètres de long que je tenais à bout de bras contre la mangeoire. Bien qu’hésitantes, elles finirent par monter à l’extrémité de la planche pour attraper une graine et partir aussi sec dans la haie d’en face pour casser la coque et déguster son contenu. Au bout d’une semaine, elles attendaient ma venue, m’observant à distance, chercher les graines de tournesol … prendre la planche … placer les graines et enfin tendre la planche en direction de la mangeoire. Aussitôt elles venaient là l’une après l’autre se ravitailler. De semaine en semaine je raccourcissais la planche, elles se rendaient bien compte que j’étais de plus en plus proche, il y avait de l’appréhension dans l’air. Cependant il en avait une qui était plus téméraire. La planche ne mesurait plus que dix centimètres et elle prenait tout son temps observant alternativement moi et les victuailles, je pouvais glisser ma main dans la mangeoire et la caresser. Finalement je n’avais plus besoin de planche, dès que sortais de la cuisine, elle fonçait sur moi, faisait du sur place à une trentaine de centimètres et dès que tendais la main avec les graines elle se posait délicatement dessus. Sincèrement, je suis de nature tenace mais je ne pensais pas arriver à ce résultat. « Il n'y a rien dont la patience ne vienne à bout quand elle est secondée de la persévérance. » Citation de Tite-Live.
Mais là où notre complicité est totale, c’est dans la danse. J’avais acquis déjà de la technique, mais elle, elle bougeait naturellement bien. Nous nous sommes inscrits dans une école de danse. Régulièrement nous faisions des stages pour parfaire notre technique. Nous formions un beau couple. Notre professeur aurait voulu que nous fassions de la compétition, ma compagne également. Ce n’est pas mon truc. L’ambiance des premiers cours étaient glaciale. Les gens parlaient très peu entre eux. Progressivement nous nous sommes intégrés, je me suis lié d’amitié avec un couple notamment le mari qui est devenu mon meilleur ami et par la suite mon témoin de mariage. Ensemble nous avons commencé à faire les imbéciles et petit à petit l’atmosphère s’est détendue. Nous avions des crises de fou-rire à n’en plus finir. Nous commencions à former un groupe d’amis. A tour de rôle, nous nous invitions. Mon ami avait une grande maison avec piscine, c’était un régal d’être en leur compagnie lors des journées que l’on passait avec les autres danseurs. Karaokés, danses, histoires drôles …, on ne s’ennuyait pas.
Le problème dans la région était qu’il n’y avait pas d’endroit où l’on pouvait pratiquer ce que l’on apprenait. Les practices se faisaient là où nous suivions nos cours. Une petite salle en ‘L’, avec un poteau en plein milieu. Je me mis à chercher une salle. Je finis par en trouver une grande « L’Hélios » sur Alainzieux Bouthéon. Je me mis d’accord avec le gérant, il mettait sa salle à disposition, il s’occupait de l’accueil et des boissons, et moi de la musique et de la sono. Pas de D.J. (Disc-Jockey), j’ai réalisé un logiciel qui gérait un programme de danse préalablement établi, indiquant sur un écran séparé l’heure exacte de chaque danse et le morceau choisi. Cela permettait à chaque couple de s’organiser, de pouvoir discuter avec d’autres, d’observer et de découvrir d’autres danses, de boire un coup et de se préparer à danser avec son ou sa partenaire le moment voulu. C’était une soirée privée, réservée aux élèves de n’importe quelle école de danse de la région. L’entrée était à 15 euros, avec une boisson sans alcool comprise, versée directement au gérant, pour ma part, avec l’aide de ma compagne, nous faisions cela bénévolement. Les professeurs étaient invités gratuitement, je les présentais et faisais la promotion de leurs écoles. Ils pouvaient dans la soirée, nous apprendre un petit quelque chose durant la vingtaine de minutes qui leur étaient consacrée. D’autre part, je ne souhaitais pas que l’on soit trop nombreux, certaines danses demandent de l’espace. C’est pourquoi je fis un site internet (www.danses.org) où les participants devaient s’inscrire. Ce site me permettait de recueillir les goûts et les suggestions des adhérents. Ainsi je pouvais adapter les soirées au plus grand nombre. Toutefois, toutes les danses enseignées étaient présentées au moins une fois. Tout y passait, du disco à la valse anglaise, du rock 'n roll au slow, de la bachata au tango argentin. De danses connues aux moins connues comme le balboa, la kizomba, la milonga … Les gens appréciaient vraiment ce rendez-vous mensuel, sauf notre professeur de danse qui pensait que je donnais des cours de danse. Je l’avais pourtant informée avant que je fasse quoi que ce soit. Elle aurait voulu être plus impliquée pour gagner de l’argent. Pour moi, il n’en était pas question. Malheureusement, au bout de quelque mois, « l’Hélios » déposa le bilan. Je vous rassure ce n’était pas de notre faute, il avait de sérieux problème de gestion. Je repartis avec mon bâton de pèlerin. La seule salle qui aurait pu faire l’affaire se trouvait à Roche-la-Molière. C’était un peu plus loin, nous n’étions pas assez nombreux pour assurer une soirée.
Nous sommes en 2015, je pouvais prendre ma retraite. C’est ce que je fis, mais avant cela, pour que les choses soit plus simple administrativement, comme prévu nous devions nous marier. Pris par le temps, nous nous sommes mariés en groupe restreint, prévoyant de faire la fête lors d’un anniversaire de mariage plus tard avec la famille de ma femme et tous nos amis. Pour cet évènement, je me devais de prononcer un petit discours que voici : « Bernard, son amoureux, à Marie son amoureuse. Marie, quand je t’ai découverte au travers du net. J’ai été rapidement impressionné, non par ta beauté, comme nombre de personne pourrait, ici, le croire … mais par tes écrits ! J’ai compris que j’avais à faire à une personne qui, au travers des épreuves de la vie, s’était dotée d’une surprenante perspicacité, un sixième sens ! Moi qui était de nature plutôt réservé, voire inabordable... tu m’as démasqué. Les choses qui me paraissaient bien invisibles aux yeux de tous, toi, tu les voyais et tu me les disais en toute simplicité et avec grande assurance. Ecrits faisant, je me suis très vite épris de toi avant même que l’on se voit. Depuis le temps a passé, et j'ai découvert bien d’autres qualités … Ta gaieté, ta grâce et ton désir d’aller vers les autres, de l’intérêt que tu leur témoignes. Tout cela m’a permis, à mon tour, d’évoluer et d’être, je l’espère, un peu plus agréable. Voilà, alors je ne sais pas où va notre chemin, mais ce que je suis sûr, c’est que je marche mieux quand ma main serre la tienne ».
Je ne voulais pas rester en France pour ma retraite, j’envisageais de vivre à l’île Maurice, j’avais été impressionné par la gentillesse de sa population et le coût de la vie me paraissait intéressant. Ma femme n’était pas emballée s’éloignant de ses enfants. Entre temps, un de mes clients, m’avait parlé du Portugal. Alors, à deux reprises nous y sommes allés, particulièrement dans l’Algarve, le sud du Portugal. Une première fois à Albufeira, point de chute autour duquel nous avons visité toute la côte sud, de Sagres à l’ouest jusqu’à Vila Real de Santo Antonio à l’est. Cela nous a nécessairement plu puisque la deuxième fois nous avons commencé à prospecter quelques agences et diverses annonces pour pouvoir nous y installer. C’est ainsi que depuis le 1° mai 2016 nous vivons au Portugal.

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